Albrecht Dürer Die Hexe (vers 1500) Staatsbibliothek Bamberg
Traduction G.M.
" Marie WEINGANT, veuve de Jacob LAUR, bourgeois de Rouffach et ancien Werckmeister, en raison de toutes sortes d’indices retenus contre elle et des fortes présomptions de sorcellerie, aussi parce qu’elle avait été dénoncée comme leur compagne et complice, Gespillin, par plusieurs personnes depuis exécutées par le feu, a été arrêtée et incarcérée le 25 février 1631 et lors de son interrogatoire, elle a avoué, d’abord spontanément puis sous la torture, ce qui suit :
Malefiz Urthe(i)l: sentence à l'issue d'un procès criminel
L'article intitulé La chasse aux marques lapidaires continue!, rendait compte de la découverte de l'une des rares traces laissées par l'ordre du Saint Esprit dans le paysage urbain de Rouffach. Dans l'un des jambage du portail de l'ancienne ferme de la rue Ullin avaient été réemployées deux blocs de pierre (remontées à l'envers!) sur lesquels figurent deux écus. L'un d'entre eux représente la croix de l'ordre des Hospitaliers du Saint-Esprit. Nous n'avons pas su interpréter alors le second écu, mais dans un commentaire à cet article, un lecteur d'obermundat.org, M. Denis Heissler, émet l'hypothèse qu'il pourrait s'agir des armoiries de la famille Zuckmantel de Brumath. Depuis, cette ancienne ferme a été démolie pour céder la place à un projet immobilier, mais les deux pierres remarquables ont été préservées et offertes à la Ville de Rouffach par l'ancien propriétaire. Sur l'envers de l'une d'elle, que l'on ne pouvait apercevoir lorsqu'elle était en place, a été découvert un troisième écu, dont nous avons soumis une photographie à M. Denis Heissler qui, très aimablement, a accepté d'entreprendre des recherches pour l'identifier, à la suite desquelles il nous propose l'interprétation qui suit:
Un hôpital au Moyen-Âge
(document kleio.org Alltagsgeschichte des Mittelalters)
Vers 1180, Guy de Montpellier (1160-1208) fonde l'ordre des Hospitaliers du Saint-Esprit et de la confrérie du Saint-Esprit dont la vocation est d'accueillir tous les déshérités de la vie, les enfants abandonnés, les pauvres et les malades. L’ordre se répandit rapidement dans toute la chrétienté, surtout en Italie et en France, avec près de 800 maisons. En Allemagne, il y en eut beaucoup moins, une dizaine, surtout en Allemagne du Sud : le premier et le plus important d’entre eux était situé en Alsace, à Stephansfeld, fondé vers 1210, au sud de Brumath. En 1270 est fondée une filiale de Stephansfeld, l’hôpital du Saint Esprit de Rouffach, que l’on appellera altes Spital, le vieil hôpital, pour le distinguer du neues Spital, le nouvel hôpital, l’hôpital saint Jacques, cité pour la première fois en 1311.
L’établissement de Rouffach comportait plusieurs bâtiments : la chapelle, l’hospice séparé de l’hôpital par le passage de l’Ombach, des bâtiments annexes servant de logement, le moulin à farine et sa boulangerie sur le même Ombach et une cour dimière dans la rue Ullin. Au XVIème siècle, l’hôpital possédait toute l’actuelle rue des Bouchers, de nombreuses maisons dans la ville, une part des revenus de l’Isenburg ainsi que des terres et des propriétés qui s’étendaient bien au-delà des limites du Mundat.
Le XVIIème et le XVIIIème siècle furent une période de déclin et en 1791 l’hôpital ainsi que la petite église furent vendus à un particulier : l’hôpital du Saint-Esprit avait cessé d’exister…
Aujourd’hui, il ne reste de ce vaste ensemble que le nom de la ruelle qui en longeait un des côtés, la ruelle du saint Esprit. Tout le reste a disparu ou a été profondément restructuré.
Peu d’archives anciennes de l’hospice du saint Esprit de Rouffach ont été conservées, transférées au fil du temps vers l’établissement de Stephansfeld, dispersées et perdues pour la plupart.
Les archives municipales de Rouffach conservent cependant un document rare qui permet, indirectement, de pénétrer dans le quotidien d’un hôpital de la première moitié du 15ème siècle : il s’agit d’un procès-verbal consignant les dépositions d’une quinzaine de bourgeois de Rouffach, de membres du Conseil, du curé de la paroisse et même de l’abbé de l’abbaye saint Grégoire de Munster, appelés à témoigner dans une procédure opposant Schultheiss et Magistrat de la Ville à Jos. von BADEN, Maître de l’hospice du Saint Esprit de Rouffach.
De quoi s’agit-il ? De tensions et désaccords entre les deux parties, mais on ne saura rien de plus et on ne saura pas le fin mot de l’affaire : nous laissons au lecteur le plaisir de deviner, au fil de la lecture des différents témoignages, ce qui a bien pu se passer…
Mais surtout, la lecture attentive des témoignages successifs lui fera découvrir une multitude d’indices qui, mis bout à bout, lui permettront d’imaginer ce que pouvait être la vie quotidienne d’un hôpital du Moyen-Âge…
Cet article fait suite à un premier, sur le même sujet, paru sous le titre Les vicissitudes d'un chef-d'œuvre: le grand portail de Notre-Dame de Rouffach (cliquez ici pour y accéder)
La population de Rouffach suit avec beaucoup d'intérêt les travaux de restauration des façades de l'église Notre-Dame et redécouvre la blondeur initiale de la pierre des carrières du Strangenberg qui a servi à sa construction. Les voussures du portail ouest ont été soigneusement débarrassées des mousses, de la crasse et des déjections de pigeons qui les avaient noircies. Le travail d'extrême précision des restaurateurs a permis de redonner son éclat au délicat entrelacs de feuillage qui orne ces voussures, les consoles et l'encadrement de la porte et même de retrouver des traces d'une polychromie ancienne ! Mais ce nettoyage n'aura pas permis de retrouver le moindre vestige du riche décor sculpté ancien, définitivement perdu...
Pourtant, de ce décor sculpté du quatorzième siècle, ont survécu au moins deux statues, conservées au Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon.
Image ci-dessus: Le peuple écrasé par les privilégiés
« â faut esperer q’eu s’jeu la finira ben tôt. Un païsant portant un Prélat, et un Noble. »
Eau-forte en couleurs, [Paris, 1789]
La France serait championne du monde des taxes et des impôts… Voilà qui n’est pas nouveau… Mais cette fois encore, on ne dira pas que c’était mieux avant ! Nicolas Chamfort, rapporte en 1794 dans ses Caractères et anecdotes les propos d’un de ses contemporains, parlant du peuple français : « un peuple serf, corvéable, taillable à merci et miséricorde »
L’objet du présent article est précisément la taille, un impôt ancien, le nom est attesté dans la première moitié du 14ème siècle en Alsace, mais surtout l’impôt le plus impopulaire à cause surtout de son montant très arbitraire. Dire que le serf est taillable signifie qu’il est soumis à l’impôt de la taille, comme corvéable signifie qu’il est assujetti à la corvée seigneuriale, au bon vouloir, à la merci, du seigneur.
Dans le monde germanique, la taille est das ou der Gewerf(f) [1] et le collecteur de la taille est der Gewerfer.
Gérard MICHEL
Ancien professeur de Lettres et passionné de paléographie, je partage sur ce blog le fruit de plus de 20 ans de travail autour de documents d'archives.
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