Intérieur de l'église de Rouffach Engelmann (vers 1830)
Pfarrers Begeren wegen einer leichtfertigen schwangern Hueren… requête du curé auprès du Conseil au sujet d’une fille de joie enceinte…
Le curé dont il s’agit est Carol Pistor dont Th. Walter nous apprend qu’il exerçait son ministère à Rouffach entre 1616 et 1619. Selon lui, il aurait été un véritable « mercenaire », ein echter Mietling ! Après que le conseil lui eut permis de remettre en état tout l’équipement intérieur, Hausrat, de son logement (meubles, vaisselle, ustensiles, luminaires, linge de maison), aux frais de la ville, il disparut sans laisser de traces : en 1619, le registre de la confrérie de la Reit qui consigne le nom des confrères et le montant de leur cotisation, note, en face de son nom : nichts mehr, ist entloffen… plus rien, s’est enfui ! (in Walter Urkunden .Buch der Pfarrei Rufach 1900).
Dans l’article intitulé Soirées chaudes à Rouffach, publié le 23 juin 2021, je m’interrogeais sur ce que pouvait bien être la tradition de l’abent tannz, littéralement danse du soir, qu’une décision du conseil de novembre 1549, le mardi qui précède la fête de Saint Othmar, interdisait sous peine d’une punition exemplaire. J’ai retrouvé dans le même registre, quelques pages plus loin, une autre occurrence de cette expression.
La cathédrale de Strasbourg transformée en Temple de la Raison 1794
Prêtre réfractaire ou non-jureur, à la Constitution civile du Clergé, promulguée en juillet 1790, Jean-Michel Vogelgsang est contraint à la clandestinité : il vivra caché, fuyant d’une maison amie à une autre, ou terré dans la maison familiale, dans l’actuelle rue Poincaré, caché sous le plancher du grenier. Il poursuivra cependant son ministère, visitant les malades et administrant les mourants…
Le 8 décembre 1793, il rend compte dans son journal du saccage par les révolutionnaires rouffachois du grand portail ouest, du cimetière et des statues qui ornaient l’intérieur de l’église Notre-Dame.
Il poursuit :
Le cimetière avait été, deux jours plus tôt, transformé en un immense champ de ruine. Les habitants de Rouffach avaient mis en lieu sûr les pierres tombales et les croix des tombes familiales. Mais tout ce qui n’avait pas été emporté ou n’avait pu l’être, fut réduit en morceaux. Il était question d’aménager un nouveau cimetière devant la porte de Froeschwiller.
… et un peu plus loin :
Dans la même nuit nous avons fait disparaître de la façade de notre maison l’image de la Vierge qui s’y trouvait dans une niche...
Cette maison existe toujours, avec sa niche surmontant la porte d’entrée, dans laquelle a été replacée une statuette de la Vierge…
Le compte-rendu du Conseil de la Ville, tenu en séance publique le 24 frimaire de l’an II (14 décembre 1793) insiste sur la nécessité impérieuse de déplacer en d’autres lieux le cimetière de l’actuelle place de l’église, côté sud, après que l'on eut débarrassé l’emplacement de toutes les pierres tombales, croix et autres signes religieux qui s’y trouvaient. Le bruit avait couru que le nouveau cimetière serait construit après la porte Est de la Ville, porte de Froeschwiller ou porte de Brisach, mais ce 24 frimaire, il en fut décidé autrement...
A.M.R. BB 2: protocoles des audiences du Magistrat de 1538
La paléographie - mot composé du grec παλαιός, ancien, et γρα'φειν, écrire - est la science qui traite des écritures manuscrites anciennes et particulièrement de leur déchiffrement. La paléographie allemande est le passage obligé pour qui veut aborder l'étude des sources manuscrites de l'histoire de l'Alsace qui, si elles ne sont pas écrites en latin le sont le plus souvent en allemand, même bien après le passage de l'Alsace à la France en 1648, date de la fin de la guerre de Trente ans et des traités de Westphalie.
En fonction des époques, plusieurs types de difficultés se rencontrent :
Les ratures, les ajouts dans les marges, les taches d’encre accidentelles, les dégâts de l’humidité ou causés par des nuisibles, ajoutent souvent une difficulté supplémentaire dans le travail du lecteur.
Et à tout cela, s’ajoute l’obstacle de la langue : en Alsace, qui veut étudier l’histoire ancienne dans les textes originaux ou faire des recherches généalogiques, se heurte à des problèmes de langue :
A la taverne Adriaen Brouwer (1605 - 1638) Alte Pinakothek Munich
La culture de la vigne et le commerce du vin représentent depuis le Moyen-Âge une activité essentielle de Rouffach : les livres censiers décrivent un ban viticole considérable et détaillent des centaines de cantons et lieux-dits dont la plupart des noms sont encore en usage de nos jours.
Le vin produit par les vignes de nos collines s’exporte au-delà des frontières de l’Obermundat où il se retrouve sur les marchés de Suisse ou sur les riches tables de l’Empire. Mais l’essentiel de la consommation reste local, dans les maisons et les familles où on en consomme des quantités importantes. (en moyenne près de trois litres à 6 / 7 degrés d'alcool, par jour et par personne, hommes comme femmes !) Il alimente les nombreux établissements de la ville, permanents ou occasionnels qui détaillent du vin : auberges, tavernes, poêles des corporations, où l’on boit généreusement, si l’on se fie aux nombreux jugements prononcés par les Conseils du Magistrat qui sanctionnent l’ébriété et ses excès, et aux imprécations de l’Eglise contre la fréquentation des tavernes, antichambres de l’enfer.
Générateur d’importants revenus pour la Ville, pour l’évêché et le Grand Chapitre, par de multiples impositions dont la plus importante est l’Umgelt, le commerce du vin, notamment dans les auberges et les tavernes, est très réglementé et étroitement surveillé.
Le présent article a pour objet trois items du règlement des aubergistes et gourmets-jurés Wurt und winsticher Ordnung de 1545, un règlement qui apportera du nouveau dans les habitudes des clients : désormais, dans les auberges, le consommateur aura le choix du vin et ne sera plus obligé de s’en tenir à celui que voudra bien lui servir l’aubergiste ! Ce n’est pas encore une carte des vins très fournie, mais l’aubergiste devra lui proposer au moins deux vins vieux et un vin de la vendange de l’année.
Aura-t-il le choix également entre rouge et blanc ? Le document ne le précise pas…
Gérard MICHEL
Ancien professeur de Lettres et passionné de paléographie, je partage sur ce blog le fruit de plus de 20 ans de travail autour de documents d'archives.
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