Portrait de Martin LUTHER par Lucas Cranach
Les archives de Rouffach sont très discrètes sur un évènement qui a été, en Alsace et dans toute l’Europe, à l’origine d’un bouleversement profond : la Réforme.
Et pourtant...
La Réforme pénètre très tôt en Alsace et s’y implante rapidement. Elle fut atteinte, dès 1520, par les écrits de Martin Luther, diffusés par les imprimeurs strasbourgeois favorables aux idées nouvelles. Même si la majorité des membres du Grand Chapitre, les chapitres de Saint-Pierre-le Vieux et de Saint-Pierre-le-Jeune comme une bonne partie du clergé traditionnel se refusèrent à embrasser la Réforme, l’évêque de Strasbourg, Guillaume de Honstein ne parvint pas, malgré sa résistance, à freiner le mouvement de renouveau.
Photo: le cardinal de Rohan, par Hyacinthe Rigaud
Le texte qui suit est un des nombreux documents édités, maintes fois réédités et complétés par la Régence épiscopale, destinés à réglementer la vie quotidienne des sujets de l'Obermundat. On ne peut que louer une telle démarche chez un évêque qui se montre si soucieux de la vertu et du salut de ses ouailles! Mais si les premiers articles peuvent paraître en rapport avec les préceptes religieux enseignés par l'église, ce n'est plus du tout le cas des derniers. De plus, les manquements aux règles ne sont plus punis d'une pénitence sous la forme de prières à réciter, de cierges à offrir à l'église ou de pèlerinages à effectuer, mais se payent avec des amendes substantielles à verser dans le trésor du prince... Ce règlement est en fait une liste d'infractions et de délits, touchant plus ou moins les préceptes de l'église, avec, noté en face de chaque manquement, le "tarif": jusqu'à trois cents livres d'amende pour avoir joué aux cartes... à verser au prince-évêque...
pour les amateurs de latin médiéval, un intéressant exercice de déchiffrage... (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
parchemin A.M.R. GG 14 n° 546 1er mai 1481
Aujourd'hui, tous les vendredis à 15 heures, une courte sonnerie des cloches de Notre-Dame de Rouffach rappelle aux fidèles la Passion du Christ et l’heure de la mort de Jésus sur la croix. Il s'agit d'un usage ancien attesté par plusieurs documents d'archive.
l'Enfer, tympan du portail occidental de l'église abbatiale Sainte Foy de Conques (Aveyron)
La mort est une préoccupation constante de l’homme du Moyen-Âge, confronté aux maladies, aux épidémies, à la famine, aux guerres… Et par-dessus la mort à laquelle le quotidien finit par l’habituer, les questions sur sa vie dans l’au-delà le hantent : les images du jugement dernier, des flammes de l’enfer, de la gueule dévorante du démon, se rappellent à lui dans les sculptures des tympans des églises, les chapiteaux, les fresques, et les sermons menaçants des prêtres en chaire. Après une vie décrite comme une vallée de larmes, sauver son âme est le but ultime: mais le croyant ne peut aspirer au salut, à la paix et au repos éternels que s’il vit selon les règles divines et respecte les préceptes que lui enseigne l'Eglise.
Un clocher vidé de ses cloches depuis la construction de la tour au dix-neuvième siècle: on constate sur la photo ci-dessus l'absence de remplage dans l'une des fenêtres de la tour octogonale qui domine la croisée du transept. C'est par cette ouverture qu'étaient hissées les cloches pour les installer dans leur beffroi. La plus grande, et donc la plus grave de ses cloches, installée en 1488, pesait plus de deux tonnes 1/2!
Gérard MICHEL
Ancien professeur de Lettres et passionné de paléographie, je partage sur ce blog le fruit de plus de 20 ans de travail autour de documents d'archives.
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