Ce panneau bleu planté au bord de la route des Cerisiers qui mène à Rouffach indique l'emplacement d'un ancien moulin à eau transformé en maison d'habitation. Ce moulin, la Hummelmühle, le moulin Hummel, était alimenté par un cours d'eau appelé improprement Vieille Thur et plus souvent canal des Douze moulins. Ce canal tire son eau de la Thur et poursuit son cours sur une trentaine de kilomètres avant de se jeter dans la Lauch. Il alimentait effectivement 12 moulins: Ungersheim, Reguisheim, l'Obermühle et la Untermühle de Meyenheim, la Schröepfermühle de Munwiller, et un second également à Munwwiller, la Hummelmühle de Rouffach, le moulin de Biltzheim et le moulin de Niederhergheim, la Tauefersmuhle de Herrlisheim et la Mattenmühle (source: Marc Grodwohl). Il manque le douzième ...
Au cours d'une recherche récente dans les fonds des archives municipales de Rouffach, je suis tombé sur un dossier (A.M.R. FF 46) portant le nom de ce moulin, qui m'a permis d'en savoir davantage sur les origines de cette maison et d'où elle tire son nom.
Glandée en forêt de chênes J. Callot
Dans l’état actuel de nos recherches, le premier document qui décrive la transhumance d’un troupeau de porcs hors du domaine forestier de Rouffach, Soultzmatt, Gueberschwihr et Pfaffenheim, figure dans le registre des délibérations du Magistrat de Rouffach, en date du 1er octobre, premier mardi après la Saint Michel, de l’année 1555.
Il s’agit d’un contrat passé entre la ville de Rouffach et 6 bourgeois de Chenebier, près d’Héricourt, pour le fainage de 298 porcs, pour une durée de près de deux mois, du 29 septembre au 21 décembre, dans la forêt de hêtres de Chenebier. Il est précisé expressément qu’il s’agit de fainage, consommation des faines de hêtres, et non de la consommation des glands de chênes.
Famille réduite à la mendicité Grav. Joost Cornelisz Droochsloot vers 1600 / 1650
Les archives municipales de Rouffach conservent un échange de courriers, entre la Ville de Rouffach, l’évêque de Strasbourg, seigneur de l’Obermundat et plusieurs autres instances au sujet d’une pénurie de céréales, et de l’importante hausse des prix du blé, seigle, orge et avoine... Sont également touchées, dans une moindre mesure, d’autres denrées comme le sel, le beurre et le suif, Anken und Unschlitt.
Ces produits de première nécessité sont devenus rares et leur prix les rend inaccessibles. La famine menace et le peuple gronde.
Jacques Callot 1592 - 1635 (Musée lorrain Nancy)
Les guerres de religion opposant partisans du catholicisme et partisans du protestantisme agitent la France entre 1562 et 1598. Au cours de ces guerres successives, les belligérants des deux camps font appel à des mercenaires allemands qui, pour rejoindre la France, passent par l'Alsace avant de traverser les Vosges. Les villes surveillent les routes et le passage de ces troupes armées. L’Alsace, peu à peu, se militarise: les habitants des différentes seigneuries s’entrainent à la guerre, les fortifications sont refaites et s’arment de canons et d’arquebuses.
Progressivement s’installe dans nos villes un climat d’"avant-guerre" qui finira, à partir de 1618, en une véritable guerre qui durera trente ans.
Rouffach sera touchée cruellement par ce conflit en 1634 : cette année, le 15 février, les suédois arrivèrent aux portes de Rouffach et assiégèrent la ville. Les gens de Rouffach, avec quelques soldats impériaux, se défendirent avec ardeur jusqu’au moment où la ville fut prise d’assaut par les suédois qui, pendant trois longues heures massacrèrent tous les hommes qu’ils rencontraient.
La ville fut mise à sac et les rouffachois furent contraints de payer aux occupants une très forte rançon, si exorbitante qu’ils durent y engager tous leurs biens et toute leur fortune. Les notables qui avaient survécu au massacre furent menés à Colmar et jetés en prison où on ne cessait de les menacer de les pendre si la rançon exigée n’était pas payée dans son intégralité.
Tout était rare et hors de prix et la famine s’installa, au point que la population en fut réduite à manger des cadavres...
L’insécurité régna de nombreuses années, tout le temps que dura la présence des suédois dans le pays.
Le lecteur trouvera ici un document extrait du registre des impositions de la Tribu À l'Eléphant de 1756 à 1768. On y découvre un classement des terres à vigne, champs, prairies et jardins du ban de Rouffach en trois catégories: les meilleures, les moyennes et les moins bonnes. Evidemment, le taux d'imposition ne sera pas le même pour les trois catégories!
Je livre ce document sans commentaire, sans notes et sans traduction, le lecteur y trouvera en caractère gras les noms des lieudits et l'intérêt y est surtout, pour le chercheur intéressé par la vigne et le vignoble du ban de Rouffach, d'y retrouver le nom de cantons de vignes dont la plupart sont encore en usage aujourd'hui, avec une orthographe parfois différente, deux siècles 1/2 plus tard...
Taxe der ligende Güetter:
Gérard MICHEL
Ancien professeur de Lettres et passionné de paléographie, je partage sur ce blog le fruit de plus de 20 ans de travail autour de documents d'archives.
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