Erneüwerung der Statt Ruffach Zins Anno Dmi. 1554 beschehen. A.M.R. A / AA 9
De quoi s’agit-il ?
Erneüwerung der Statt Ruffach Zins , c’est-à dire renouvellement du livre censier de la ville de Rouffach.
Nous disposons aux archives municipales de Rouffach d’un livre censier de la ville de Rouffach de 1492 à 1520. Il nous est impossible aujourd’hui de dire s’il y a eu entre 1520 et 1554, date du présent document, une autre copie, mise à jour : ces livres sont d’utilisation fréquente, avec de nombreuses corrections, surcharges, ratures correspondant à des mises à jour régulières nécessaires après des décès, ventes, rachats, etc. Il est donc nécessaire, au bout d’un certain temps, comme cela se fait également pour les obituaires, de « remettre au propre », de recommencer un nouveau livre qui recopie l’ancien mais en tenant compte des modifications intervenues entretemps. Et cela se fait de manière officielle, en présence du Schultheiss Diebolt WOLFART, de deux représentants du conseil mandatés par le Magistrat, et de la plupart des Zinsleuthen, directement concernés.
Quel peut être l’intérêt pour un historien, de déchiffrer, transcrire, traduire, analyser et commenter un tel document qui, finalement, ressemble à un banal document comptable, plutôt peu engageant. L’intérêt pourtant est considérable, c’est avec ce type de document qu’on écrit l’histoire et qu’on peut pénétrer dans l’intimité de la vie quotidienne du Rouffach ancien.
Voyons un peu ce que, au-delà des chiffres, nous apprend ce document :
saint Urbain, saint patron des vignerons, bénissant la ville de Rouffach photo G.M.
En parcourant les archives anciennes, les comptes rendus des séances du Magistrat notamment, on découvre rapidement qu’on buvait beaucoup, et surtout beaucoup de vin. Rouffach a toujours été une terre à vignes, les ressources ne manquaient pas, les occasions de boire étaient nombreuses et on ne les manquait jamais !
Les fêtes religieuses étaient beaucoup plus nombreuses qu’aujourd’hui et finissaient souvent par des repas en commun bien arrosés. D’autres occasions donnent lieu à des banquets et à des libations : la reddition des comptes annuels des différents offices de la ville, le jour du Schwörtag, le zwölften Tag , la réception de nouveaux bourgeois, la visite du seigneur ou d’un prince étranger, le repas qui suit l’exécution d’une sorcière, la fête de la dédicace de l’église, toutes les fêtes familiales, etc.
On boit chez soi, soit de sa propre production, soit du vin acheté chez l’un des nombreux Gassenwirth qui vend son vin über die Gasse et chez qui on ne peut pas consommer sur place, ou chez le Schildwirth qui dispose d’un établissement signalé par une enseigne et propose à sa clientèle du vin, mais aussi des repas et éventuellement un hébergement. Mais on boit aussi dans les Zunft Stuben et la , Raths Stube les poêles des corporations, qui elles aussi, débitent du vin, et souvent en grande quantité…
peinture à l'huile de Carl JORDAN (1904) Les femmes de Rouffach
source gallica Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg
Dans un article consacré à Rouffach sous la Terreur, nous avons pu mesurer le courage des femmes de Rouffach face aux révolutionnaires : une première fois lorsqu’elles ont pris la défense d’un malheureux contre le Wachtmeister TÖNLEN, de sinistre réputation, et une autre, en saccageant et renversant la « Montagne » érigée par les Patriotes dans l’église paroissiale, rebaptisée Temple de la Raison.
Une autre action courageuse leur aurait valu, plus de 7 siècles auparavant, en 1068, un privilège rare : celui d’occuper lors des célébrations à l’église paroissiale Notre-Dame, la place réservée habituellement aux hommes, le côté droit de la nef.
Dans le recueil Sagen und Geschichten aus deutschen Gauen, August Stöber (1808-1884), rapporte une vision des faits, romantisée par la tradition populaire et édulcorée par l’usure du temps :
Cet article fait suite à l’article intitulé L'assaut et la prise de la ville par les suédois en février 1634, racontée par Jean Simon MÜLLER dans l'Urbaire de la Ville, URBARIUM RUBIACENSIS CIVITATIS, de 1727. Rouffach sort exsangue de la guerre de Trente Ans: la population est décimée, l'économie ruinée, les cultures perdues.
Le chroniqueur conclut par ces mots :
Tout cela montre clairement ce que notre bonne ville de Rouffach a enduré au cours de cette guerre des suédois comme angoisses, chagrins et misère auxquels peu de bourgeois ont survécu, une grande partie d’entre eux sont morts de frayeur, de faim et de chagrin.
La Une du Progrès illustré relatant la catastrophe de Bouzey (88) le 27 avril 1885
L'hiver 1709 a été évoqué dans un article précédent paru sous le titre 1709 un hiver particulièrement rigoureux et meurtrier. Cette fois Jean-Simon MULLER nous parle d'un autre hiver qu'il a vécu, celui de l'année 1739 au cours duquel beaucoup de gens sont morts gelés et qui anéantit les réserves de vin et les espoirs de récolte de l'année suivante. Une année 1740 où les pluies et la fonte des neiges ont été la cause d'une catastrophe meurtrière qui noya de nombreuses personnes: la rupture de la digue du lac du Ballon.
Gérard MICHEL
Ancien professeur de Lettres et passionné de paléographie, je partage sur ce blog le fruit de plus de 20 ans de travail autour de documents d'archives.
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