Nous avons évoqué plusieurs fois dans ces pages la figure de Jean-Simon MÜLLER, le rédacteur de l’URBARIUM RUBIACENSIS CIVITATIS ou Stadt Buch und Urbarium von Ruffach, conservé aux A.M.R. dans le fonds ancien des archives municipales, série AA n° 11.
Cet Urbaire rassemble des copies des anciennes chartes et lettres qui contiennent les droits et les privilèges de la ville depuis les années qui ont suivi sa fondation. Mais ce registre contient aussi des passages de vraie chronique, dans lesquels l’auteur évoque des événements dont il a été un témoin direct.
Nous avons choisi un passage dans lequel il décrit un hiver particulièrement rigoureux et meurtrier, celui de 1709, il y a un peu plus de 300 ans, à une époque où on ne parlait pas encore de dérèglement climatique…
Le registre A / BB 126 conservé aux archives municipales de Rouffach est le recueil des serments (Aid) que doivent prêter devant le Magistrat réuni, tous les serviteurs de la Ville. Cette prestation de serment a lieu le lendemain du Zwölften Tag, le douzième jour après Noël, jour du renouvellement des différents offices et charges. Il s'agit d'un document d'un intérêt considérable puisqu'il détaille avec une extrême précision les devoirs de chaque office et permet de comprendre mieux les institutions de la Ville.
... le matin, tous les maçons et tailleurs de pierre avaient été convoqués au pied de l’église. On leur donna l’ordre d’arracher et de briser toutes les sculptures, toutes les croix, représentations des saints et tout ce qui avait trait à la religion catholique. A dix heures du matin trois ouvriers maçons s’affairaient à briser les sculptures du grand portail, un chef d’œuvre qui n’avait de pareil que celui du portail de la cathédrale de Strasbourg et qui représentait le Jugement dernier. Une grande quantité d’autres précieuses statues, qui se trouvaient à l’intérieur de l’église et en particulier dans le chœur furent également saccagées. Le cimetière avait été, deux jours plus tôt, transformé en un immense champ de ruine. Les habitants de Rouffach avaient mis en lieu sûr les pierres tombales et les croix des tombes familiales. Mais tout ce qui n’avait pas été emporté ou n’avait pu l’être fut réduit en morceaux. Il était question d’aménager un nouveau cimetière devant la porte de Froeschwiller.
Les journées de travail de l'artisan, de l'ouvrier ou du paysan du Moyen-Âge et du début des temps modernes sont rythmées par le jour et la nuit et par le rythme des saisons. Les journées de travail sont longues et pénibles et laissent généralement peu de place à ce que nous appelons aujourd'hui loisirs... Malgré la nécessité impérieuse de travailler pour assurer sa subsistance et celle des familles, le peuple des travailleurs était contraint à des journées où il lui était interdit de travailler, d'exercer son métier, sous peine de sanctions sévères. Ainsi près d'un tiers des journées de l'année étaient chômées, tous les dimanches bien sûr, mais aussi toutes les fêtes religieuses fixes et mobiles, fêtes calendaires, etc: fête du saint Patron de l'église, de la dédicace de l'église, jeudi-saint, vendredi saint, solennité de Pâques, Ascension, Pentecôte, Assomption, nativité de la Vierge, Toussaint, saint Martin, Noël, Epiphanie, etc. Sans oublier les fêtes des saints patrons des confréries, la fête de Mai, les fêtes des moissons, des vendanges...
Lorsque les cloches de l'église Notre-Dame sonnaient à toute volée à quatre heures du matin pour donner du cœur à l’ouvrage au bon peuple des travailleurs… et qu’un trompette ivre et maladroit s'époumonait à sonner toutes les heures de la nuit, du haut de sa tour…
Gérard MICHEL
Ancien professeur de Lettres et passionné de paléographie, je partage sur ce blog le fruit de plus de 20 ans de travail autour de documents d'archives.
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