Décor d'une salle du restaurant Zum Lœjelgucker *** 67 TRAENHEIM: le travail du vigneron ...
Les livres de comptes ont toujours été pour le chercheur une source inépuisable de renseignements précieux : ceux du Burgermeister, comptable des recettes et dépenses de la ville, ceux des tribus, des corporations et confréries, de l’hôpital, de la léproserie, du prieuré de Saint Valentin, de l’hospice du Saint Esprit, permettent mettre à jour de petites pierres dont l’assemblage contribuera à la construction de l’histoire.
Dans notre travail sur l’histoire du vin et du vignoble à Rouffach, nous avons repris les livres de compte de l’hospice du Saint Esprit qui nous ont livré un document important sur le vin et la vigne; ils nous ont permis en outre d’ajouter quelques éléments à une recherche entamée il y a quelques années sur le bâti de l’hospice, son église et la maison de l’ordre.
Commençons par le vin :
Photo Mescla Patrimoine / Epitopos
Pour l’accompagner dans le dégagement des polychromies sur les clés de voûtes du chœur de Notre-Dame de Rouffach, l’entreprise Mescla Patrimoine a été rejointe par Epitopos, un laboratoire d’analyse des matériaux du patrimoine et de l’archéologie, pour l'analyse des pierres, peintures, pigments, liants, mortiers...
La cave des Hospices de Strasbourg abrite le plus vieux vin au monde, un blanc né en 1472.
photo dans Christophe Reibel La Vigne - Vitisphere le 22 janvier 2015
Le vin a une importance considérable dans l’économie de Rouffach dès le haut Moyen-Âge et il participe à la richesse et à la renommée de la ville. C’est une source de revenus pour le peuple, c’est une source de richesse pour les bourgeois et surtout pour les nombreuses cours appartenant à de riches abbayes parfois lointaines qui perçoivent les revenus des terres qu’elles possèdent à Rouffach, ainsi que pour le seigneur de la ville, l’évêque et les chanoines du grand chapitre qui perçoivent la dîme en vin.
De ces cours, dont certaines sont mentionnées dès la fin du 7ème siècle, il subsiste encore des traces dans l’architecture ou la toponymie de la ville, telles les rues de Pairis et de Lucelle, ou le fenestrage gothique de la galerie de l’étage de la cour d’Eschau, visible depuis la Promenade des Remparts.
En 640 selon Sebastian Münster, 662 selon T. Walter ou 675 selon Grandidier, Dagobert donne à l'Eglise de Strasbourg une curtis [1] in pago qui vocatur Rubiaca. Le récit de cette donation ne repose sur aucune charte authentique retrouvée et relève de la légende. Cependant, elle a bien eu lieu: à quel moment, par qui, le mystère demeure...
Rapidement, ce domaine s'étendra et sera progressivement découpé en parcelles plus ou moins importantes, qui seront offertes, avec terres, vignes, habitat et habitants, par les évêques successifs, à des communautés religieuses qui les feront fructifier et en tireront leur revenu.
Le lecteur trouvera ci-après une liste, non exhaustive, de ces abbayes, couvents, commanderies, prieurés, qui ont été les premiers propriétaires, et viticulteurs, de nos vignes, les domaines du Vorbourg, Galg Buehl, Leimen, Rot Mürle, Bollenberg, Schlittweg, Sanct Lendelin...
Rufach 1616 Petrus Bertius (1565-1629) Commentariorum Rerum Germanicarum liber tertius
le dossier « Rubiacum » déposé en février de cette année, a été retenu par les commissions chargées de l’examiner, ANR (Agence Nationale de la Recherche) et DFG (Deutsche Forschungsgemeinschaft) et l’étude débutera dès le printemps 2024 pour se terminer en juin 2027.
L'objectif est une reconstitution virtuelle du cadastre de la ville médiévale, à partir d'archives (livres censiers, comptabilité, plans) et des vestiges matériels (enceintes, charpentes et caves des maisons, églises, édifices publics). Cette vaste entreprise, fruit d'une coopération binationale, croisera ainsi une approche historique, archéologique, la prospection géophysique, géomatique, l’archéologie sédimentaire et archéométrique des vestiges matériels, la datation par dendrochronogie et carbone 14, etc.
Clé de voûte du chœur, le 5 juillet 2023 avant le début de la campagne de restauration
Les travaux de restauration du chœur se poursuivent, dans la quiétude et la concentration d'un atelier insoupçonné, perché à 15 mètres du sol de l'église... Deux entreprises y travaillent, Mescla Patrimoine et Orpimento, toutes deux alsaciennes, la première de Strasbourg, la seconde de Barr. Les couleurs et les ors réapparaissent progressivement sous les outils des restauratrices et restaurateurs et chaque jour offre de nouvelles découvertes.
Le lecteur trouvera ci-après quelques photos prises le 8 et le 16 novembre... Pour agrandir les images, il suffit de cliquer sur chacune d'elles. Bonne visite!
Gérard MICHEL
Ancien professeur de Lettres et passionné de paléographie, je partage sur ce blog le fruit de plus de 20 ans de travail autour de documents d'archives.
Cette page contient des liens vers des outils et sites partenaires autour de la paléographie, l'histoire et l'Alsace.
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