Maison de recette du Grand Chapitre de la cathédrale de Strasbourg, actuel presbytère catholique de Rouffach
Avant la Révolution, le clergé de la paroisse de Rouffach, curé et vicaires, étaient installés dans une maison de la rue des Prêtres, qui valut d’ailleurs son nom à cette rue, die Pfaffengasse. Après la Révolution, les prêtres quittèrent cette maison, que l’on continua d’appeler, jusqu’aujourd’hui, « l’ancien » presbytère. Il fallut alors leur trouver un « nouveau » presbytère convenant à cet usage. Et c’est alors que commence un invraisemblable parcours de recherche, un feuilleton qui se poursuit une trentaine d’années, avec de multiples péripéties, sans que l’on parvienne vraiment à savoir où, pendant ce temps, étaient logés ces malheureux curés sans domicile fixe…
Dessin de Jean-Baptiste Schacre, Architecte (Delle 1808 - Mulhouse 1876)
En matière d’histoire, il est nécessaire de revenir souvent sur ce qu’on a écrit : ce qui semble vrai aujourd’hui, ne le sera peut-être plus demain... Il suffit d’une découverte dans un document écrit ou sur le terrain, une petite note ou une image, pour mettre en cause ce qui paraissait une certitude quelque temps auparavant. L’histoire bouge constamment, on pense parfois que tout a été dit sur tel ou tel autre sujet et on découvre qu’il reste encore bien des choses à dire.
Bien sûr, certaines découvertes ne vont pas bouleverser ce que nous savions jusque-là, et la mise au point que je propose dans l’article qui suit ne va pas provoquer « d’effet papillon » et déclencher un tollé parmi les historiens… [1]
Dans cet article je reviens sur un article édité le 3 juin 2019 intitulé Le nouveau maître-autel de N.D. de Rouffach, ancien maître-autel des Dominicains de Colmar.
Couverture du ZINSBUCH des Spittals Sant Jacob 1492
Depuis quelques années , je suis à la recherche d’indices qui attesteraient le passage de pèlerins qui auraient fait étape à Rouffach sur leur route vers Saint Jacques de Compostelle. Dans les cahiers de comptes des Burgermeister successifs, comptables de la Ville, sont notées scrupuleusement toutes les recettes et surtout les dépenses, même les plus modestes. Y figurent notamment les aumônes données, umb Gottes Willen, pour l’amour de Dieu, à une multitude de gens de passage, nécessiteux de toutes sortes, indigents, malades, infirmes, estropiés, jetés sur les routes, en quête d’un asile et de quelque nourriture.
Parmi eux, des pèlerins qui, dans cette foule, se distinguent des vagabonds : le pèlerin accomplit « un voyage de plus ou moins longue durée, effectué pour faire une visite à quelque lieu sacré en esprit de pénitence, de piété ou d’action de grâce » [2]
Portrait de Léopold de Habsbourg, évêque de Strasbourg
Jacques MERTZEISEN, qui présentera sa conférence sur Léopold de Habsbourg, évêque de Strasbourg et homme de guerre, n'est pas un inconnu pour les lecteurs d'obermundat.org: il est l'auteur de plusieurs articles parus dans ces pages sur Leopold, personnage hors du commun, homme d'église et homme de guerre ambitieux, sur lequel il porte un regard inédit...
On attend habituellement d'un homme d'église l'intégrité, la charité et la bienveillance: Nicolas VERDOT, prieur de couvent Saint Valentin à Rouffach, ne possédait, lui, aucune de ces vertus! Il succède à Nicolas TERRESTRE, déposé de ses fonctions par le légat du pape pour sa vie dissolue et la mauvaise gestion des biens du prieuré. Il sera d'ailleurs condamné à restituer 1000 livres bâloises. Nicolas VERDOT, qui l'avait dénoncé, sera nommé prieur et se comportera de la même manière que son prédécesseur, Nicolas TERRESTRE ! Cité à comparaître à la Régence d'Ensisheim, il plaida une grave maladie et disparut totalement pendant huit mois... Lorsque le prieuré et tous ses biens furent remis au séminaire épiscopal de Molsheim les comptes firent apparaître que TERRESTRE et VERDOT avaient détourné 1000 florins ! Nicolas VERDOT réapparut après le départ des Suédois et l'entrée des troupes françaises dans Rouffach: il avait réussi à se procurer du roi de France une missive qui lui reconnaissait ses droits sur le prieuré. Après plusieurs péripéties il fut chassé mais revint, sous la protection des armes, au prieuré, où il mourut en 1636.
Les registres de délibération des séances du Magistrat conservent plusieurs signalements au sujet des frasques de ce personnage, connu pour son caractère irascible, ses écarts de langage et sa brutalité.
Voici l'une de ces affaires, au cours de laquelle notre homme s'en est pris avec violence au portier de la Porte Neuve de la ville, la porte Nord, dite également porte de Colmar.
Gérard MICHEL
Ancien professeur de Lettres et passionné de paléographie, je partage sur ce blog le fruit de plus de 20 ans de travail autour de documents d'archives.
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