Glandée en forêt de chênes J. Callot
Dans l’état actuel de nos recherches, le premier document qui décrive la transhumance d’un troupeau de porcs hors du domaine forestier de Rouffach, Soultzmatt, Gueberschwihr et Pfaffenheim, figure dans le registre des délibérations du Magistrat de Rouffach, en date du 1er octobre, premier mardi après la Saint Michel, de l’année 1555.
Il s’agit d’un contrat passé entre la ville de Rouffach et 6 bourgeois de Chenebier, près d’Héricourt, pour le fainage de 298 porcs, pour une durée de près de deux mois, du 29 septembre au 21 décembre, dans la forêt de hêtres de Chenebier. Il est précisé expressément qu’il s’agit de fainage, consommation des faines de hêtres, et non de la consommation des glands de chênes.
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Un peu de vocabulaire avant de commencer :
La compagnie des tireurs est à Rouffach une institution ancienne dont on trouve les premières traces dans les archives en 1539, mais qui remonte sans doute à bien plus loin. Rappelons que pour être bourgeois à Rouffach il fallait pouvoir justifier la propriété d’une pièce d’armement, maintenue en parfait état, pour pouvoir assurer la défense des portes et des murs en cas de nécessité. Celui qui pouvait s’acheter une arquebuse, un mousquet ou un fusil peut avoir envie de s’en servir… et de nombreux règlements édictés par le Magistrat rappellent l’interdiction de se servir des armes à feu lors de festivités telles des baptêmes ou des mariages, à cause du danger que ces tirs représentent. On conçoit aisément que pour canaliser l’enthousiasme des tireurs, les autorités ont permis, voire encouragé, la création d’associations qui allaient pouvoir s’adonner à leur passion de manière réglementée.
Car c’est bien de passion qu’il s’agit et cette compagnie n’est pas une milice qui ne s’entraînerait que pour la seule défense de la ville. Les textes nous présentent une association de compagnons, Gesellen, qui se retrouvent sur leur terrain d’exercice pour mesurer leur adresse entre eux, au tir bien sûr, mais aussi à des jeux auxquels les règlements de police de la ville les autorisent, comme les jeux de quilles et les jeux de dés ! Un privilège rare, puisque ces jeux étaient habituellement sévèrement réglementés et même interdits !
Les rouffachois connaissent bien cette lithographie réalisée d'après un dessin de J Rothmüller (1804-1862): elle représente l'état de l'église paroissiale de Rouffach avant les grands travaux entrepris en 1867 qui se poursuivront jusqu'en 1879, avec une interruption causée par les troubles de la guerre de 1870. Sur cette image figurent encore deux édifices aujourd'hui disparus, la Neuhaus, nouvelle Maison de Ville et la Metzig, nouvelle boucherie.
Sur le mur nord de l'église sont encore représentées les baraques et échoppes érigées entre les contreforts de l'église qui disparaîtront pour permettre les travaux à l'église, après près d'un demi-siècle de tractations parfois tumultueuses entre les propriétaires, le Conseil de Fabrique et la Commune. Le mur sud était également pourvu de constructions identiques que les textes appellent tantôt en français baraques, échoppes ou cabanes et en allemand gaden,
Il subsistait encore il y a quelque temps, avant les récents travaux de restauration des enduits, des traces de ces constructions, laissées par la fumée des forges ou des cheminées qui y étaient installées. Des trous de boulins destinés à recevoir des corbeaux insérés dans le mur et qui soutenaient la panne faîtière, restent visibles et marquent la hauteur de ces bâtisses.
Le poèle de la Tribu À l'Éléphant, 4 rue de la Poterne Rouffach
Au cours du Conseil ordinaire tenu par le Magistrat en septembre 1548, le maître de la Tribu À l'Éléphant, rapporte aux conseillers les plaintes des maçons de la ville dont la corporation subit la concurrence déloyale d'artisans "étrangers" . Cette affaire nous permettra de voir un des rôles importants des corporations qui est de protéger leurs membres des activités d'étrangers qui "casseraient les prix" ou produiraient des ouvrages de qualité moindre qui pourraient ternir la renommée de l'artisanat de la cité. Au seizième siècle, la ville de Rouffach comptait quatre tribus, reconnaissables à leur enseigne:
Mais revenons à notre affaire et voyons de quoi il s'agit:
Faisant suite à l'article publié précédemment sous le titre Signes lapidaires de l'église Notre - Dame de Rouffach, voici un relevé des signes lapidaires figurant sur la façade occidentale de l'église Notre-Dame de Rouffach, réalisé par Pierre-Paul Faust, historien et archiviste de la Ville.
A l'époque où Paul a procédé à ces relevés, la façade ouest de l'église était en travaux et un échafaudage métallique avait été installé, la couvrant jusqu'à la pointe du gable, au-dessus de la galerie et de la rosace. Cette façade était devenue, le temps des travaux, le terrain de jeux de Paul qui y passait des heures à détailler la moindre sculpture, les signes lapidaires et graffitis... J'ai eu l'occasion de m'étonner de son agilité lors de deux ou trois ascensions auxquelles il m'avait permis de l'accompagner: C'était en 1962 et je terminais alors un mémoire de fin d'études que, ne doutant de rien, j'avais intitulé: Rouffach, petite ville d'art alsacienne... Peu à l'aise sur les échafaudages et moins audacieux que Paul, j'ai néanmoins pu prendre une série de photos intéressantes pour illustrer mon travail.
Gérard MICHEL
Ancien professeur de Lettres et passionné de paléographie, je partage sur ce blog le fruit de plus de 20 ans de travail autour de documents d'archives.
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