© photo Service régional de l'Inventaire d'Alsace 1999
Une restauration attendue... Saint Valentin et l'épileptique (18ème siècle)
Personne n’ignore, au moins l’espère-t-on, qu’il existait à Rouffach jusqu’à la fin du 18ème siècle, au pied du château d’Isenbourg, un prieuré bénédictin fondé au Xième siècle qui devint rapidement un lieu de pèlerinage célèbre à travers toute l’Europe d’alors : il accueillait les épileptiques et leur famille qui venaient prier et implorer la guérison de leur mal devant les reliques de saint Valentin.
Après la Révolution, l’ensemble de ce prieuré, église, maison, cour, hangar et jardins, devenu Bien national, est vendu par lots, 33 au total, par les propriétaires, le citoyen Jean Ulrich Metzger et Consorts de Colmar, le 1er et 2 avril 1793, par Me Hertzog, notaire à Colmar. Les archives départementales de Colmar conservent les minutes de cette vente ainsi que le plan dressé le 21 février 1793. L’ensemble avait été acquis à la suite d’une adjudication, le 19 décembre 1791. Le lot n° 1, d’une superficie de 185 perches de Colmar, contenant l’église, le cloître, une maison d’habitation et un pressoir daté de 1753, fut adjugé pour 14100 livres au citoyen Johann Valentin Goll et Consort de Colmar.
Le 20 février 1809 débutèrent les travaux de démolition de l’église des jésuites, l’église Saint Valentin. "Les deux autels latéraux avaient été offerts, quelques années plus tôt, à l’église des franciscains. Le propriétaire aurait souhaité offrir le bel autel principal orné de quatre colonnes, à l’église paroissiale. Mais on n’accepta que le tableau de saint Valentin et un autre de saint Xavier qui se trouvait sur un autel latéral. Toute la ville déplore la vente et la démolition de cette église qui est maintenant la troisième de nos cinq églises. La même destinée attend également l’église des franciscains."
(Source : MS 860 (Réserve) B.N.U. Strasbourg Journal de l’abbé Jean Michel VOGELGSANG.)
Selon Jean Michel Vogelgsang, les pierres de démolition de l’église auraient servi à la construction du nouveau canal ?
Cette vision d’avenir de l’abbé Vogelgsang ne se réalisa pas totalement : l’église des franciscains a survécu à la Révolution, notamment grâce d’ailleurs à Jean Michel Vogelgsang lui-même. Mais de l’église du nouvel hôpital saint Jacques il ne reste rien aujourd’hui. De celle du vieil hôpital, il ne subsiste que le nom de la ruelle qui y conduisait, la ruelle du saint Esprit. De la notoriété « européenne » du prieuré saint Valentin, de son cloître et de son église, il ne reste plus que le souvenir : la rue du Prieuré, un grand vitrail représentant saint Valentin dans l'absidiole du transept sud de l’église paroissiale et, dans la même absidiole, un buste-reliquaire en bois doré du 18ème siècle, représentant saint Valentin, provenant de l'ancien prieuré. Sans oublier une grande toile Saint Valentin et l'épileptique, provenant elle aussi du même prieuré. Ce tableau du 18ème siècle, inscrit au titre des monuments historiques, une huile sur toile connue sous la dénomination Saint Valentin et l’épileptique, représente le saint, implorant la bénédiction divine pour un malade épileptique étendu à ses pieds.
La toile aurait été longtemps entreposée dans l’église paroissiale, derrière le maître-autel et a fini par être accrochée dans le porche d’entrée du presbytère, exposée aux intempéries, où elle a subi d’importantes dégradations, volontaires ou non. Puis elle a été entreposée, avec deux autres toiles de la même dimension, dans une réserve froide et humide du presbytère. Aujourd’hui, elle présente d’importantes déchirures, des accrocs, plusieurs lacunes et une altération générale de la couche picturale.
La première à avoir pris conscience de la valeur patrimoniale de ce tableau fut Paulette Lichtlé, figure essentielle de la vie rouffachoise, membre de la société d’histoire et d’archéologie pendant plus de 40 ans. Son souhait le plus fort était de faire restaurer cette œuvre et de lui redonner la place qui lui revenait. Elle avait fait part de son projet à Monsieur Jean-Pierre Toucas, maire de la Ville de Rouffach, qui l'assura de son soutien et lui fit la promesse que la Ville assumerait cette restauration. Guide bénévole, elle reversait, pour son projet, les pourboires qu’elle recueillait lors de ses visites et menait campagne pour recueillir des dons. De son côté, le conseil de fabrique a décidé d’ouvrir un compte à la C.M.D.P. pour recevoir cet argent, destiné à la restauration de la toile et de son cadre, et Paulette y déposa 2000 Euros. Le Conseil de la Fabrique de l’église provisionna ce même compte de 8000 Euros. Dans le souci de les protéger et les rendre accessibles, il a pris la décision, le 21 juin 2023, de faire don à la Ville de Rouffach d’une série d’œuvres dont la paroisse était propriétaire. Parmi elles, le tableau de saint Valentin et deux autres, représentant l’un saint Laurent et l’autre saint Arbogast.
Le 14 décembre 2023, le conseil de fabrique a demandé aux ateliers Orpimento de Barr 67 d’établir un devis pour cette restauration, un devis qui s’élève à 38.940 Euros. Le 15 octobre 2024 la ville de Rouffach, propriétaire du tableau, a décidé lors d’une délibération de Conseil municipal du 15 octobre 2024, d’entreprendre le sauvetage de cette toile et de son cadre et d’en confier la restauration à l'atelier Orpimento de Barr 67.
Ces travaux de restauration bénéficient du soutien et du financement de la Ville de Rouffach, du Conseil de Fabrique de Rouffach, du Conseil général, de la Région et de la Drac ...
Au terme de cette opération, le tableau retrouvera une place dans l’église paroissiale, vraisemblablement dans le transept sud, face au vitrail représentant le Saint et à l’autel sur lequel est posé le buste-reliquaire.
Encollage de la toile recouverte de papier Japon © photo Orpimento
Ce mardi 6 mai 2025, Laurent Sellier secondé par deux collaboratrices, a procédé aux soins nécessaires avant le transport de l’œuvre. Première étape, l’encollage à la colle animale de toute la surface picturale qui sera recouverte de papier Japon, à la fois très fin et très résistant. Cette première opération est destinée à protéger la couche picturale et empêcher la peinture craquelée de s’écailler lorsqu’elle sera roulée pour son transport.
La toile est débarrassée des clous forgés qui la fixaient à son châssis photo g.m.
Mercredi, la toile est débarrassée de son châssis et roulée sur un cylindre, puis quitte la remise où elle était entreposée, pour l’atelier Orpimento de Barr, chargé de sa restauration. photo g.m.
La toile est roulée sur un cylindre et emballée dans du papier bulle... photo g.m.
photo g.m.
Les importants travaux à prévoir pour la restauration de cette toile et de son cadre devraient occuper près d'une année. Nous tiendrons régulièrement nos lecteurs informés de leur avancée.
Nos pensées vont vers Paulette, qui aurait été heureuse de voir son engagement reconnu et son vœu se réaliser ...
Gérard Michel
L’auteur remercie M. Bernard Staad, président du Conseil de Fabrique, pour les précieux renseignements qu’il a trouvés auprès de lui.
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