Sur ce plan de la ville tiré de la Cosmographie de Sebastian Münster de 1548, figurent encore l'église sanct Steffan, un puits à balancier et les bâtiments de la commanderie de l'ordre teutonique.
Nous proposons ici le premier article d'une série consacrée au village disparu de Suntheim. Pour beaucoup, ce nom évoque le C.A.T. Moulin de Sundheim, pour d’autres un centre équestre ou une pension pour chiens et chats. Pour quelques rares autres, un hameau disparu, il y a bien longtemps, au sud de Rouffach, du côté du C.H.S.
Victime de l'oubli...
Thiébaut Walter termine son article consacré aux trouvailles faites au moment des travaux de terrassement pour la construction du C.H.S., en souhaitant qu’après avoir détruit sans scrupules les vestiges de Suntheim, les décideurs compétents rappellent au moins son souvenir en incluant le nom du village disparu dans le nom donné au futur établissement. Il n’a pas été écouté... Ce lieu mériterait au moins une signalisation, rien qu'un petit panneau, comme ceux qui signalent les lieux-dits, au bord de la route et qui rappellerait ce village disparu...
Suntheim était bien plus qu’un hameau de quelques pauvres bâtisses. D’abord, c’était la demeure de plusieurs familles nobles qui ont essaimé plus tard en d’autres lieux. A Suntheim se trouvait la première implantation des Chevaliers de l’ordre teutonique, avec des bâtiments et leur église. A Suntheim aussi, une église de paroisse, l’église saint Etienne dont des vestiges ont subsisté longtemps après la disparition du village. Un couvent de femmes qui fut transféré à Guebwiller et devint le couvent Engelpforten, de la porte de l’Ange, une communauté de religieuses de l’ordre teutonique, une léproserie, un moulin, des maisons d’habitation, des rues, des champs, des prés et des vignes…des gens, des activités, une vie qui demande qu’on s’y intéresse et dont l’histoire reste à faire.
Nous proposons dans cet article la traduction d’une charte rédigée le 13 septembre 1442 dans laquelle il apparaît que le village était déjà vide de ses habitants et que l’église n’y était plus desservie. Notre document de travail est une transcription ancienne en allemand sur papier, conservé dans l’enveloppe contenant le document original en latin sur parchemin A.M.R. GG 14 classé dans les parchemins par Th. Walter sous Parchemins n° 416:
Nous, évêque de Bâle par la grâce de Dieu et du Saint Siège de Rome, faisons savoir, que se sont présentés devant nous les maîtres d’œuvre ou receveurs de l’église de Rouffach, évêché de Bâle et nous ont fait savoir qu’au temps passé, il y avait, non loin de la ville de Rouffach, un village appelé Suntheim. Dans ce village, il y avait une église paroissiale dotée de cens et autres revenus qui permettaient d’entretenir convenablement un curé ou un desservant. Mais il est arrivé un moment où tous les habitants du lieu étaient décédés ou avaient déménagé et le village s’est retrouvé vide de ses occupants. Depuis, l’église est sans entretien et inutilisée, et les différents revenus qu’elle percevait dans le passé disparaissent peu à peu. Il est donc impossible de nommer et d’entretenir un curé ou un desservant. Les âmes des fidèles chrétiens qui reposent dans le cimetière et dans le sol de l’église paroissiale sont ainsi privées des services religieux et du secours de la prière.
C’est la raison pour laquelle les maîtres d’œuvre et receveurs de l’église paroissiale de Rouffach prient humblement que soient réunis à l’église paroissiale de Rouffach, l’église de Suntheim et le peu de revenus qui y sont encore attachés et que nous ayons la bonté d’user de notre autorité pour confirmer cette réunion.
Nous, Fréderic, évêque de Bâle, avons donc appris la vérité dans cette affaire par des témoignages dignes de foi, et nous avons estimé que cette requête était justifiée et fondée. En conséquence, afin que des offices religieux puissent à nouveau être célébrés pour le salut et à la mémoire des croyants qui reposent dans le cimetière consacré de l’église de Suntheim et aussi pour les nécessités de l’église paroissiale de Rouffach, nous avons décidé avec l’accord de notre cher Heinrich SCHIFFERSTEIN, curé de l’église de Rouffach, de réunir cette église de Suntheim à la fabrique et à l’église de Rouffach, avec tous ses revenus (rechten, nutzen, gulten, und zufellen). Nous attestons et confirmons cette réunion des deux églises, par le pouvoir de notre autorité épiscopale, au nom du Dieu très saint dans la présente charte.
Nous donnons également à tous les administrateurs de l’église de Rouffach, de manière ferme et sans contestation possible, à eux et à leurs successeurs, l’entier pouvoir de recevoir, posséder, disposer et placer tous les revenus de l’église de Suntheim (fru(ch)te, nutze, zinse, gulte, und alle anderen felle) au profit de l’église de Rouffach et de la fabrique de l’église, maintenant et pour l’éternité.
Cette réunion ne doit pas servir exclusivement à l’église de Rouffach et de sa fabrique pour leur seul usage mais également pour que dorénavant des offices puissent être célébrés mieux et plus nombreux dans l’église Suntheim.
C’est pourquoi nous décidons et nous ordonnons à tous les administrateurs de l’église paroissiale de Rouffach qu’ils prennent soin que soit lue et célébrée avec recueillement, toutes les semaines, par un prêtre honorable et compétent (instruit), en l’église de Suntheim une sainte messe à la mémoire et pour le salut des âmes qui reposent en ce lieu. Nous reconnaissons aussi par cette charte que tout ce qui est dit et écrit ci-dessus l’est par notre volonté et dicté par la nécessité. S’il arrivait que dans l’avenir cette église de Suntheim voie se multiplier ses rentes et autres revenus de manière telle qu’elle puisse à nouveau subvenir à l’entretien un prêtre, nous ordonnons que les dispositions que nous avons prises et accordées comme il est dit ci-dessus n’aient plus ni validité ni pouvoir et qu’elles soient totalement abrogées et annulées.
Nous conservons, pour nous et nos successeurs, tous les droits et revenus que nous avons sur cette église de Suntheim, comme cela a été jusqu’à présent.
Personne ne doit contester ou agir contre les termes de cette charte et les dispositions qui y sont écrites. Celui qui s’en rendrait coupable, tomberait dans l’indignité et la disgrâce auprès de la très vénérable Vierge Marie, notre sainte patronne et de son fils.
Nous, Friederich, évêque de Bâle, avons fait appendre notre sceau à cette charte pour en attester l’authenticité, l’année où l’on compte mille quatre cent quarante-deux ans depuis la naissance du Christ, le treizième jour du mois de septembre.
Wir, von der Gnode Gots und des bebestliche Stüls zu Rome Bÿschoff zu Basel, tünt zü wissende, das für uns kommen sint die Bümeister oder Schaffener des buwes der pfarkirchen zu Rufach, Basel bÿstum, und fürbrocht hant, wie daz vor ziten gewesen sie, nohe bi der stat Rufach, ein dorff genant Sünthein, dar inne ein lütkirche gesetzt, die mit gülten und züfellen erberlich gestiftet und begobet, da durch ein lutpriseter oder ein verseher mit zÿmlich narunge und notdurft besorget und versehen wart. Nu aber von todes nöten solliche lute da selbes wonende abgestorben ganz und abgangen sint, und das Dorff gentzlichen zergangen, die selbliche lutkirche Ursatz und unversorget stunde, darumb daz solliche zinze, nutze und zü velle so die selbe lutkirche ettwene vor zitten gehebt hette, so gar abgangen werent, daz dehein Lutpriester oder verseher nahrünge haben mag, da durch die Cristen glaübigen Selen der lichnam in der kirchhofe und der selben lütkirche ruwende sint, götliches dienst und hilffe berobet sint. Dar umb daz nü sollichs etlicher mosse ernuweret und gemeret (sucharge gebessert) werde, so hant uns die obgenanten bumeister und schaffener der pfarkirchen zü Rufach diemüteliche(n) gebetten, daz wir die selbe Lutkirche und lütpriestrie die denn also ursatz stande mit sollichen zinsen nutzen und zu fellen, die doch kleyne sint zu dem büwe der pfarkirchen zü Rufach vereynigen und sollichs mit unserm gewalt gnedekliche zu bestetigen. Und also haben wir, Friderich, Bischoff zü Basel vorgenant, in dieser sache die worheit erfaren und an erber kuntschaff funden und hant nü gütlichen angesehen daz solliche bette zymlich und billich sye, und befunden dar an das gotz dienst gefurdert und gemerret werde, der gloubigen selen heil und gedechtnysse die in dem gewichten kirchhofe der egenanten kirchen suntheim ruwende sint mit gotz dienste versehen werden. och der pfarkirchen zü Rufach und des buwes nütz und notdurt daran bekannt und hant die selbe lütkirche oder lutpriestrye zü suntheim mit allen iren rechten, nutzen, gulten und zu fellen der kirchen zu Rufach und Irem buwe mit wissen und gütem willen unsers lieben in gotte Heinrich SCHIFERSTEINs, kirchernn der egenanten kirche zü Rufach, dem solliche lihunge der vorgenanten kirchen zü suntheim und einen lutpriester dar uf zü gebende und zü antwurtende so dicke die ledig wurt, mit allen rechten zu gehört bestetige vereinyget und zü sammen broht, und bestetigent och sollichs mit unserm byschoffliche gewalt in dem Namen gotz mit disem gegenwertigen brieffe wir geben och und verlihen allen bumeystern und schaffenern der kirchen zü Rufach die nu sint und allen Iren nochkommen in dem Ampt, gantzen, vollen gewalt der vorgenanten kirchen oder Lutpriestrye zü sunthein Alle ire fruhte, nutze, zinse, gulte und alle ander felle uf zü haben, zü besitzen, zü habende, zü nyessende und die anzülegende zü nütze und notdurft der vorgenanten kirchen Rufach und an Iren bü nü und eweklich, one alle und aller menglich widerrede Sid (?) wir aber nü solliche bestetigünge vereinyüng und züsamenbringung hant lassen zü gon nut alleyne umb nütz und notdurft willen der vorgenanten kirchen Rufach und irs buwes Bisunder och daz da durch gotz dienst in der engenanten kirchen zü suntheim fürbass me gemerret und gebesseret werde. Harumbe so wellent und gebietent wir allen bumeistern und schaffenen in de lutkirche zü Rufach und des büwes. daz su fürbass me alle wüche schaffen und besorgen wellent daz gelesen werde ein messe und gesprochen in der egenanten kirchen zü suntheim durch einen jeglichen weltlichen erbern und gelerten priester dem och sollichs von uns unsern gewalt und aller unser noch kommen mit urlob gegönnet und erlobe wurt aldo messe zü sprechende und zü habende der selbepriester bisunder in dem ampt der heiligen messe gedechtnisse der selen die da bestattet und rüwende sint, andehtekliche haben und begon sol wir bekennent och mit disem brieffe daz alle obgeschriben ding durch uns beschehen mit unserm willen zü gangen und durch notdurft gegönnet sint. Wer aber sache daz die egenante kirche zü Sunthein yemer me und zü kunftigen ziten wider uf wurde gen an zinsen oder an andern gulten gemerret möhte werden, da mit ein priester der daz besunge narünge und notdurfft haben möhte, so ordenent wir und wellent, daz solliche bestetigunge, vereiniunge (sic) und zübrigunge so denne durch uns beschehen und gegönnet worden ist, also vorstat, fürbass me dehein krafft noch maht haben sol noch mag, und gentzlich wider rüfft und abgeton sin sol, Och mit fur worten so behalten wir fur uns und alle unser nochkomment, alle die reht so wir den hant zü der egenanten kirchen zü sunthein mit sturen, Collecten uf zü legende, also daz den gewohlich und an uns kommen ist. Hie wider disen brieff und diese unser ordenunge vereinyunge also den obgeschriben ist, nyeman tun sol noch schaffen getan werden in deheynen weg mit frefel oder sust wie man den hie wider kommen möhte, wer och aber hie wider tete der fiele in ungenoden der aller erwirdigesten jungfrowen Marien unsere patronen und Irs ein gebornen sunes und och unser(vide!) Und des zü einem woren urkunde und gezugnysse, so haben wir, friderich, bÿschof zü basel vorgenant unsers hoffes Ingesigel getun hencken an disen brieff, in dem jore da man zalte von der geburt crÿsti M IIII XLII, in dem XIII tage des monatz septembr(is).
Thiébaut Walter: Suntheim, l'oubli...
Die letzten Reste Alt Suntheims wären somit vom Erdboden verschwunden und neues Leben blüht bereits aus dem Ruinenfelde. Das ist nun einmal so der Zeiten lauf und der lebende hat immer Recht. Aber eine heilige Pflicht der Pietät den schweigsam Toten gegenüber würde unsere Landesbehörde sicherlich erfüllen, wenn sie wenigstens den Namen der alten Siedlung der Nachwelt retten wollte, indem sie der neuen Heil und Pflegeanstalt die Bezeichnung Rufach - Suntheim oder Suntheim bei Rufach beilegen würde.
Gräberfunde bei den Erdarbeiten in Suntheim-Rufach in Straβburger Post Nr 757.
Les derniers vestiges du vieux Suntheim ont ainsi disparu de la surface de la terre et une nouvelle vie s'épanouit à présent sur le champ de ruines. Ainsi va le cours du temps et la vie reprend toujours ses droits. Mais le noble sentiment du devoir accompli envers ces morts silencieux gonflerait certainement les cœurs des autorités de l'Etat si elles consentaient au moins à préserver pour la postérité la mémoire de cette vieille communauté, en ajoutant à la suite du nom du nouvel établissement de soins la mention Rouffach-Suntheim ou Suntheim-près-Rouffach....
Gérard Michel