Le mouvement des béguines apparait dès la fin du 12ème siècle dans le Nord de l’Europe. Il regroupe des femmes d’origines diverses, plutôt issues de milieux modestes, qui se consacrent à Dieu, décidées à vivre leur foi de manière plus radicale, mais en conservant leur état laïc et sans vivre recluses dans une abbaye ou un monastère. Elles se consacrent le plus souvent à l’éducation, au soin des malades, à la prière et à la contemplation, sans qu’elles aient, comme les moniales, dominicaines, franciscaines, augustines…, prononcé de vœux perpétuels.
Le mouvement s’étend rapidement et prend une ampleur considérable : une lettre de Jean XXII à l’évêque de Strasbourg fait état, en 1331, de 200.000 béguines, rien qu’en Allemagne occidentale. En 1372, 1300 béguines vivent à Bruxelles !
Veuves ou célibataires, elles s’établissent en petites communautés, le plus souvent aux abords d’un hôpital dans lequel elles prodiguent leurs soins aux malades, et d’un couvent masculin à l’abri duquel elles peuvent trouver la protection et le secours spirituel d‘un prêtre.
Chaque communauté définit elle-même les règles de la vie communautaire, propre à chacune d’elle mais qui se rapprochera progressivement, dans bien des cas pour certaines d’entre elles, de la règle du tiers ordre des franciscains, dominicains ou augustiniens.
Les béguines, ne prononçant pas de vœux, restent laïques, donc hors de la tutelle de la hiérarchie ecclésiastique.
Trois règles de vie semblent être communes à tous les béguinages :
- vivre une vie simple, dans la pauvreté apostolique
- vivre non de la mendicité mais du travail de ses mains
- vivre dans la chasteté
La conduite de la communauté est entre les mains d’une Meisterin ou d’une Mutter, maîtresse ou mère, choisie ou élue par l’ensemble des femmes.
Le béguinage peut offrir une voie religieuse alternative à des femmes qui, souvent pour des raisons économiques, ne peuvent entrer dans un monastère à l’accès souvent réservé à une aristocratie, seule capable de verser la dot exigée à l’entrée. Ou encore pour celles qui ne souhaitent pas devenir ces religieuses « roturières » au service de nobles moniales, dans les monastères bénédictins féminins.
Les béguines, n’ayant pas prononcé de vœux perpétuels, restent libres de quitter la communauté, pour se marier, par exemple.
Pour les béguinages, le travail est une nécessité économique, mais il est aussi un aspect de leur spiritualité qui les mène vers l’humilité, la pauvreté et le service des pauvres. De nombreuses sources indiquent qu’elles s’occupent de lavage, de repassage, de blanchissage du drap ou de lavage de la laine, ce qui les conduit souvent à s’installer près d’un cours d’eau.
« Le mouvement des béguines séduit parce qu'il propose aux femmes d'exister, en n'étant ni épouse, ni moniales, affranchies de toute domination masculine», explique Régine PERNOUD [1]
Un mouvement d’une telle ampleur voyant se multiplier des communautés de femmes, non cloîtrées, non soumises à une règle monastique et donc à la hiérarchie religieuse, vivant de surcroit en autonomie économique, dans une société et surtout une Eglise avant tout masculine et rigoureusement structurée, ne pouvait que devenir suspecte.
L’Inquisition, créée en 1231, conduira des béguines au bûcher, condamnées pour hérésie. Une bulle du pape Clément V[2], le pape du procès de l’Ordre du Temple, interdit les béguinages et prononce l’exclusion des béguines de l’Eglise de Dieu ! [3] Le Concile de Vienne (1311 – 1312), présidé par le même Clément V condamne le mouvement béguinal comme hérétique.
Les béguinages disparaîtront progressivement un peu partout, sauf en Flandres, victimes de la répression qui poussera un grand nombre de ces femmes dévotes à rejoindre des communautés, cette fois clôturées, structurées et sous contrôle de la hiérarchie ecclésiastique.
Les béguinages de Rouffach.
Dans l’état actuel de nos recherches, les documents trouvés, ceux des A.M.R. et ceux des A.D.H.R, concernant les béguinages de Rouffach sont assez peu nombreux.
Ils couvrent une courte période qui va de 1333 (encore qu’il ne s’agit pas d’un document original mais d’une copie de 1711) à 1414, c’est-à-dire 81 ans. Rien avant, et plus rien après…
Thiébaut WALTER évoque brièvement l’histoire des béguines à Rouffach, lorsqu’il parle du couvent des franciscains, das Minoriten Kloster in Rufach : il y affirme que les sœurs des béguinages appartenaient le plus souvent au Tiers-Ordre de saint François [4] et qu’elles s’étaient rattachées aux puissants couvents des franciscains au moment des temps de misère et de dangers. Ce qui est sans doute vrai, une source de 1358 situant effectivement une des maisons, celle dite « des sœurs de Soultzmatt », établie à proximité des franciscains de Rouffach :
„…dem Konvente den man spricht die Swestern von Sultzmatt gesessen zu Rufach bi den Barfüsser… „
Mais le mot bi pour bei signifie-t-il ici qu’elles étaient établies près de ou chez les franciscains ?
L’une des difficultés de l’étude des béguines vient de ce que, dans aucune de nos sources, ne figure le mot béguine, begine en allemand. Elles sont toujours désignées par Schwester, sœur, un mot qui désignera aussi plus tard un membre d’une confrérie laïque qui sera appelé Bruder et Swester, ou encore des ermites. Ainsi Lienhart STÜLER, qui exerçait jusqu’alors les fonctions de « Pfister » à Saint Valentin, est nommé par décision du bailli et du magistrat en 1515 « zu einem Bruder zu Sant Steffan Gotzhuss ». Le couple qui en 1515 s’installe dans das Gothus de Suntheim, Hans WEGELIN et son épouse Berbelin WAGNER, sont nommés par le Magistrat «zu einem Bruder und Swester » dans le « Gotshuss » de Suntheim, où ils sont chargés d’entretenir les vignes et de veiller à ne pas y accueillir de gens malhonnêtes (uneliche Lüt)…
Or le mot « Gotteshus », au Moyen Âge, désigne un couvent, les bâtiments d’un couvent, et non pas uniquement le bâtiment d’une église. Ces « Bruder und Swester » sont-ils des ermites ou tout simplement de gardiens vivant dans un lieu consacré ? Ou alors subsistait-il encore à Suntheim, abandonnée depuis bien longtemps, une communauté religieuse dont nous ignorons tout, au stade actuel de nos recherches…
Les « Fräulein » de Rouffach…
Même encore après la Révolution, pendant la Terreur en 1793, Jean Michel VOGELGSANG parle de Schwestern de Rouffach pourchassées par les républicains… alors qu’il n’y a pas d’ordre religieux féminin à Rouffach.
VOGELGSANG fait très certainement référence aux « Fräulein » pour qui avait été construite sur la partie Nord-Ouest de la place de l’église « das Fräulein Haus ». Ces « Fräulein » sont les demoiselles (ou dames) de l’instruction chrétienne, une institution fondée en 1724 à Ensisheim par les demoiselles d’OLIVIER, deux sœurs, pour l’instruction des jeunes filles.
En 1725, l’une d’elles, Madeleine, vient à Rouffach chez son frère, François David D’OLIVIER, curé doyen de l’église Notre-Dame (1720-1737). Elle parvient à fonder une petite communauté dégagée de la prononciation de vœux. En 1732 est construit l’immeuble sur la place abritant la communauté, réparti en 6 appartements indépendants. Elle y fonctionne jusqu’en 1748, année où la communauté achète le grand bâtiment, dans la Zwingelgasse (Fräulein Gasse, actuelle rue des Ecoles), qui allait devenir par la suite l’école des filles de Rouffach. La même année, le 11 avril 1748, décède Magdalena d’Olivier, « institutrix virginum doctrinae Christianae, quae sequenti die sepulta fuit in ecclesia prochiali coram altari sancti Laurentii ». Les anciens locaux furent vendus à des particuliers. La maison de Rouffach subsista jusqu’en 1793 ; elle fut vendue comme bien national et les Demoiselles pensionnées comme religieuses. Après les tourments révolutionnaires il semble bien qu’elles aient repris leur activité dans la maison dite « Golbéry » de la Zwingelgasse. En 1811, la dernière « supérieure », Regina ou Reine KLOPP lègue tous les biens de la communauté à la ville, à la condition expresse « qu’un nombre suffisant des sœurs de la Providence ou de toute autre société approuvée par le gouvernement sera mis et chargé de donner dans deux classes différentes, l’une primaire et l’autre plus élevée, aux jeunes filles de Rouffach une éducation et instruction conforme et convenable à leur état ».
Dans sa séance du 10 février 1861, le Conseil municipal de Rouffach décide de l’achat du bâtiment déjà cité, soit à l’amiable, soit par voie d’expropriation pour cause d’utilité publique. Un accord ne peut être trouvé avec tous les propriétaires. L’expropriation fut décidée par jugement du tribunal civil de Colmar en date du 2 juin 1862. Le dernier obstacle au dégagement de l’église et de la place disparait ainsi, laissant la voie ouverte pour la grande entreprise de restauration et d’achèvement de l’église Notre Dame.
L’autre difficulté réside dans la dénomination de ces différentes maisons et dans l’imprécision de leur localisation géographique. Nous avons relevé à ROUFFACH les dénominations suivantes :
- Isenburg Convente …dem Convent den man sprechet von Ysenburg
- dem grossen Convente
- dem Konvente den man spricht die Swestern von Sulzmatt
- eine Convente Swester in ORTLIEBE genante
- der MEIGERIN Convente gelegen ze Rufach
S’agit-il de cinq établissements différents? Ne pourrait-il pas s’agir, pour certains d’entre eux, d’un même établissement qui, à travers son histoire, a porté des noms différents ? Nous savons que MEIGERIN est un nom propre, celui de la fondatrice de la maison, Catherine MEIGER.
Peut-être en est-il de même d’ORTLIEB ? Une famille Ortlieb a vécu à Rouffach à ce moment-là : l’acte de fondation du prieuré de Saint Valentin, mentionne en 1183 un certain Ortlibus et le Liber Vitae mentionne un Nicolaus ORTLIEB. S’agit-il d’un membre de cette famille qui aurait créé et donné son nom à ce couvent ?
A notre connaissance, ORTLIEB ne désignant pas un lieu-dit de Rouffach, l’explication ne doit pas être cherchée de ce côté-là.
Le Convent appelé grossen Convent n’est pas celui des femmes d’Isenbourg, puisqu’un livre censier conservé aux archives de Rouffach fait nettement la différence entre les cens dus à l’un et l’autre :
… Dis sint die Zinse so Isenburg Convente und dem grossen Convente zugehörent…
Le mot convent lui-même peut également prêter à confusion. Il désigne aujourd’hui autant une communauté religieuse, parfois nombreuse, que des bâtiments, église, cloître, dortoirs, réfectoire, communs, etc. Mais les béguines, d’abord, ne sont pas à vrai dire, une communauté religieuse au sens où on l’entend habituellement. Pour ce qui concerne les béguines, tout au moins celles de Rouffach, Convent, ne désigne qu’une petite, voire très petite communauté, trois, quatre ou cinq femmes, qui se réunissent ou vivent en communauté dans une maison particulière sans architecture spéciale.
L’étude attentive des différents documents, essentiellement des chartes, actes de vente ou d’échange de biens, donations au profit des différentes maisons, permet de lever un peu le voile sur ces communautés de béguines établies à Rouffach.
…Sultzmat Convent ze Rufach…
A.M.R. Charte n° 98 (GG 52) 14 août 1358
Joseph KELLER, bourgeois de Rouffach et son fils Peterman, constituent une rente de 6 livres à la Meisterin, et aux sœurs du couvent de Soultzmatt et toutes celles qui leur succèderont :
… den erbern, bescheidenen der Meisterin und dem Convent den man sprichet die Swestern von Sulzmat gesessen zue Rufach bi den Barfüßern und iren Nachkomen, sechs Phunt…
A.D.H.R. 1364
Johann BERGER de Gundoltzheim se présente devant la cour de justice présidée par Jacob von SCHOENOWE, chevalier, prévôt de Rouffach, la mardi qui précède la Saint Michel de l’an 1364, et se plaint de ce que la « Meisterin » du couvent des sœurs de Soultzmatt ne lui reverse pas des intérêts Zinse auxquels il prétend avoir droit.
Cette charte confirme donc que ce « couvent » des sœurs ou des femmes de Soultzmatt, sis à Rouffach, est organisé et dispose d’une hiérarchie, puisqu’il est question dans cette affaire d’une « Meisterin », une maîtresse qui représente la communauté …
A.D.H.R. 1397
Schwester ELSIN von Merkensheim et Schwester URSELLE du Sultzmat Convente, du Couvent (des soeurs) de Soultzmatt sis à Rufach, accompagnées par Johannes ZELLER, leur tuteur, ihr Vogt, se présentent devant la cour de justice présidée par Claus SURCANT [5], le lundi qui suit la saint Valentin de l’an 1397, pour se plaindre de ce que Henin LUTERWIN leur doit une redevance annuelle de six schilling pour trois schatz de vignes situées près de la maison de l’ordre teutonique, à Suntheim. Ce LUTERWIN ne respecte pas ses engagements et, de plus, il néglige l’entretien du bien. Aussi demandent-elles de pouvoir dénoncer le bail afin de pouvoir à nouveau disposer de leur bien.
Ce Soulzmat Convent est donc bien situé à Rouffach. Pourquoi alors cette dénomination Soulzmat Convent ? Pour l’instant, les documents d’archives consultés ne permettent pas de donner une réponse à cette question…
A noter que les deux sœurs sont accompagnées de leur tuteur pour une démarche qui concerne leur bien.
A.D.H.R. 1409
On retrouve dans ce document sœur Elsin von MERKENSCHEN dont il avait été question dans le document de 1397, cette fois il est dit d’elle die ersame Jungfrau… . Elle est donc célibataire… Elle se présente à l’audience de la cour de justice présidée par Jacob OCHSENBACH, prévôt de Rouffach pour une affaire au sujet de rentes à payer… A noter qu’elle semble être seule à se présenter devant le prévôt, il n’est pas fait mention d’un Vogt ou tuteur comme c’était le cas 12 ans auparavant…
S’agit-il de la même « swester Elssin » dont il sera question dans le livre censier de 1420, Unser lieben fröwen zins buch ze Rufach[6] et qui lègue après son décès « 2 bette und 4 kussin, 1 serge, 2 erin heffen, 2 kistellin, 2 kannen », deux lits et quatre coussins, une couverture de lit, 2 pots en alliage de cuivre, deux petits coffres et deux pots ou bidons… » à l’église Notre-Dame…
La maison était-elle éteinte en 1420, au décès d’Elsin ? Aucun document ne permet pour l’instant de répondre à cette question. Une famille « von Merkenshen » est encore mentionnée, possédant une propriété à Rouffach en 1482[7], s’agit-il de la famille d’Else?
…der von Isenburg…
A.M.R. GG 56 du 28 juin 1333.
Ce document des A.M.R. est une copie du 20 novembre 1711, signée Jean Paul SEITZ notaire et greffier de Rouffach.
…Ich, Lütschin BOTZELIN, ein Burger von Rufach, und wür, Kathrine und Grede seine Swester, Anne BASILWINDin und Catharine HILTENBRANDin die Swestere von Isenburg,… vendent à KUNen von Geispoltzheim, Meister de l’hospice du Saint Esprit à Rouffach, 6 Juch de prairies.
Doit-on conclure de ce document qu’en 1333, les sœurs d’Isenbourg étaient au nombre de quatre : Catherine et Grede, les sœurs de Lütschin BOTZELIN, Anne BASELWINDin et Catherine HILDENBRANDin ?
Cette charte a été rédigée et signée le lundi qui suit la saint Jean Baptiste de l’année 1333. Les A.M.R. conservent une seconde copie de cette charte, traduite en français, qui date du 31 décembre 1771, signée MÜLLER, avocat et secrétaire interprète au Conseil Souverain d’Alsace, ainsi qu’une troisième, également en français, datée du 26 août 1726 et signée SIFFERT.
On peut se demander pourquoi une charte de 1333, concernant un béguinage, a été recopiée en allemand en 1711, traduite en français en 1711 et retraduite en français en 1726, dans des actes officiels par greffier, notaire et avocat, soit respectivement 378 et 393 ans après l’acte original, presque quatre siècles, alors que les béguinages avaient cessé d’exister depuis bien longtemps? Vraisemblablement quelqu’un revendiquait-il ou contestait-il la propriété de ces six juch de prairie et a-t-on recherché dans les archives un titre pouvant servir de preuve. Encore n’est-il pas exclus que ces documents puissent être des faux et que le document original de 1333 n’ait jamais existé !
A.M.R. 6 juin 1356 Charte n° 81
Burkelin SURCANT, le prévôt de Gueberschwihr Gebliswilr et son épouse Clara, assistée de son tuteur, lèguent à la communauté des sœurs du couvent dit d’Isenbourg, leur maison et leurs dépendances de la rue dite Witengasse :
…dass wir reht und redelich gewechselet hant eins steten ewigen Wechsels für uns und alle unsere Erben, und ich, die vorgenante Clara mit mins Vogtes, hant als re(c)ht ist und ich billich sollte mit den erbern Kinden und Swester dern Meisterin von dem Convent den man sprechet von Ysenburg, unsern Hof und Hus mit allem Begriffe so dar zu hörent…
A.M.R. GG 52 Charte n° 133 du 20 mars 1368
Hanneman von MERKENSHEIN et Oettelin, son frère, bourgeois de Rouffach, instituent une rente perpétuelle de la valeur d’un quartaut de seigle à valoir sur un juchart de champs au profit de la Meisterin et du couvent des soeurs d’Isenbourg:
…der Meisterin und dem Convent von Isenburg zue Rufach und Iren Nachkomen alle Jar soellent Inen geben eweclich ein vierteil Rocgen Geltz…
A.D.H.R. 1372
Henin BOLLE, bourgeois de Rouffach fait savoir qu’il a « vendu » une rente annuelle de 5 quartauts de seigle, en son nom et celui de ses descendants, à l’honorable Meisterin et au couvent des « sœurs » ou des femmes de la maison d’Isenbourg, établi dans la ville de Rouffach, à valoir sur une maison, son Hof et son jardin , sise à Rouffach dans la Salzgasse, la rue du Sel.
A.D.H.R. 1399
Claus SURCANT, prévôt de Rouffach, présidant la cour de justice du Magistrat, au nom et en place de Hans von Westhus, écuyer et bailli de Rouffach, fait savoir que s’est présentée devant lui soeur Grede LOWENBERG, sœur du couvent des dames de Isenbourg qui a déclaré que Henin KRIEGER de Westhalten devait à ce même couvent une rente perpétuelle équivalant à quatre Ohm de vin, due sur 7 Schatz de vignes se trouvant dans le Hanfland , - la chenevière - , qu’il ne payait pas ce qu’il devait et qu’en plus il n’entretenait pas le bien…
A.D.H.R. 1402
Henin LISE, bourgeois de Rouffach, fait savoir qu’il a „vendu“ une rente annuelle de un florin (Gulden) en or sur 4 Juchart de champs dans la Isenbreit, de 1 Juchart et demi dans le Rangk et de 11 Schatz de vignes. Cette vente est faite à la Meisterin du couvent des femmes d’Isenbourg, établi dans la Witengasse à Rouffach et elle est due à Sœur Nese (Agnes) SWITZER aussi longtemps qu’elle vivra ou qu’elle habitera dans ce dit couvent.
Ce couvent se trouve donc situé dans la Witengasse à Rouffach…
Convent in ORTLIEBE…
A.M.R. JJ 17 Charte n° 237 du 2 juin 1399
Clevin SENGELIN déclare devant Claus SURCANT, prévôt de Rouffach siégeant en conseil, que lui-même et ses héritiers doivent une rente perpétuelle de 7 schillings monnaie bâloise à valoir sur deux Schatz de vignes, à payer annuellement le jour de la saint Marc, aux sœurs du couvent dit Ortlieb et à celles qui leur succéderont.
1400 A.D.H.R.
Claus SURCANT, prévôt de Rouffach fait savoir qu‘a comparu devant lui alors qu’il siégeait à la cour de justice du Magistrat une sœur du couvent appelé in Ortlieb , Anne WISSMEIGERin de Soultzmatt… eine convente swester in Ortliebe genante ze Rufach…
Cette maison s’appelle in Ortlieb : soit Ortlieb est un lieu-dit, soit c’est une maison, peut-être celle de la fondatrice qui aurait pu s’appeler Ortlieb. tout comme le Meigerin Convent portait le nom de sa fondatrice, Catherine MEIGER, dans la maison dans laquelle il était établi.
Un certain Ortlieb de Sulzmatt, le dernier représentant de la lignée, avait été en 1358 un des fondateurs de la confrérie dite de la Reit à Rouffach. Th. Walter [8] pense qu’il pouvait également être le fondateur du béguinage qui porte le nom de sa famille et que ce même béguinage avait pris plus tard le nom de « couvent » des femmes de Soultzmatt, dont Elsin de MERXHEIM assurait la direction.
…der groz convent…
Un seul document, conservé aux archives de Rouffach, fait état de cette communauté :
A.M.R. GG 52 Charte n° 94 du 21 juin 1358
Cecilia von Onbach, sœur de Hesse von Laubgassen, assistée de son Vogt, tuteur, Reinbolt von Merkensheim, lègue aux sœurs et Meisterin du couvent appelé grossen convent, sis à Rouffach, dans la Witengasse, divers biens.
Cette communauté est donc établie Witengasse, …dem convent den man sprechet der groz convent, ist gelegen zue rufach in der stat in witengasse… dans la même rue que le couvent dit Meigerin.
Mais il ne s’agit pas de la même maison, puisque Cecilia von Ombach, dans la même charte, précise que ce groz convent devait verser une rente annuelle au couvent des franciscains ainsi qu’au « couvent » … in der Meigerin Hof…
Meigerin Convent…
A.M.R. JJ 19 Charte n° 65 du 22 mars 1348, avec un sceau de la ville de Rouffach bien conservé.
Henin HEINRIAT, bourgeois de Rouffach et son épouse Odilie vendent à Katherina MEIGER, une rente d’une livre bâloise et divers biens qu’elle-même donne aux sœurs installées en communauté dans sa maison.
Katherina MEIGER est la sœur célibataire du défunt Reinbold MEIGER :
…der erbaren, bescheidenen Jungfrowen Katherinen MEIGER, Reinboldes seligen Swester in Frone Hofe…
Dans cette vente, elle est assistée par un tuteur, et elle lègue aux sœurs qui vivent dans sa maison, située am Gewicke, et à toutes celles qui leur succèderont, la livre de rente. Nous n’avons pas pu jusqu’à présent localiser cette maison : cette indication am Gewicke, dont il est fait mention plusieurs fois dans les sources, désignerait la jonction de deux ou plusieurs routes formant patte d’oie. Mais où se trouve cette jonction ?
…. und ich, Katherine MEIGERin, …mit mins Vogtes hant an disem Briefe für mich und alle mine Erben dasz die Swester, die in mine Huse sint, das da lit am Gewike, nebent der von Iffental und die nach mime Tode dar inne sinde und wonende werdent, dasz vorgenanten Phunt Geltez jerliche nehmen söllent…
De cette livre de rente, les sœurs devront, après sa mort, prélever deux schillings pour célébrer les messes anniversaires du décès de Katherine et de son frère :
…und söllent die selben Swester jerlich, so min Jargezit und mins Brueders seligen MEIGER Reinboldes vallet, von dem selben Phunde Gelts zwene Schillinge viropferen durch Got und durch unsere Selen Willen…
En 1363, soit quinze ans plus tard, Catherine MEIGERin sera désignée comme décédée :
… in der Meigerin seligen Hus, das litin der obgenanten Stat am Gewike, zwischent Heintzin FROESCHes Hus und Henselin FLAXLANDen Hof…[9]
A.M.R. GG 52 Charte n° 293 du 30 mai 1413
Frère Burkart PETER, prieur, Gardian, du couvent des franciscains de Rouffach, atteste qu’a été conclue en sa présence la vente d’une maison, d’un Hof et de toutes ses dépendances, situés in Witengasse, par Jeckelin SCHADE, bourgeois de Rouffach au profit des sœurs du couvent appelé Meigerin Convent, représenté par sœur Gerschin HUNDELINGERin :
…in Namen und an Stat Swester Gerschin HUNDELINGERin und des Conventz den man spricht der MEIGERIN Convente gelegen ze Rufach in Wittengasse zwüschent Lutscheman LUDEWIGE und der von Flachslanden Hoff…
A noter que c’est le prieur des Franciscains qui conclut la vente, au nom et à la place de la Meisterin du couvent dit Meigerin Convent, lui servant en quelque sorte de tuteur.
Ce couvent, Meigerin Convent, est donc installé dans une maison de la Witengasse, entre la propriété de Lutscheman LUDEWIG et celle de Henselin FLAXLANDen.
Les documents que nous avons pu consulter, essentiellement des chartes sur parchemin, actes de ventes, échanges ou donations, ne permettent pas de conclusions sur ce que pouvait être la vie quotidienne de ces femmes.
Tout au plus peut-on dire que, même si le nombre de maisons peut surprendre pour une ville telle que Rouffach, elles formaient de petites communautés, de trois à cinq sœurs.
Pourquoi l’appellation groz convent pour l’une de ces maisons, dont on sait au demeurant très peu de choses ? Grand par ses dimensions, grand par le nombre de sœurs ?
Il est très probable que la vie dans ces maisons de Rouffach était à peu de détails près, calquée sur celle d’autres maisons dont on a pu reconstituer une histoire plus complète, parce que les documents conservés sont plus variés, plus complets et bien plus nombreux, comme c’est le cas en particulier pour les béguinages de Haguenau ou de Strasbourg.
Un béguinage à Suntheim? ...des recluses qui deviennent dominicaines…
Des recluses de Suntheim deviennent « prediger schwestern », une communauté de dominicaines. Cette expression est attestée dans une charte du 11 avril 1289 qui atteste la vente de rentes sur des biens situés sur le ban de Zellenberg, par Reinbold von Zellenberg aux dominicaines de Suntheim établies près de l’église Saint Etienne.[10]
Le terme qui désigne ces femmes est « … incluse in Suntheim… » et dans les Dominicains de Guebwiller « Clausnerin ». Il faut cependant se garder de comprendre sous ce mot « incluse » ou « recluse » l’état de recluse, emmurée dans un reclusoir… D’abord, la recluse y est toujours, ou à de rares exceptions près, seule. Or, il est dit qu’à Suntheim elles étaient plusieurs. Ensuite, la recluse vit ou survit dans son reclusoir grâce à la nourriture que déposaient, ou plutôt jetaient par une étroite ouverture, les personnes de passage. Et elle n’est certainement pas en mesure d’amasser une petite fortune qui permettrait d‘acheter un terrain à Guebwiller.
Nous avons là un cas nullement isolé de reclusoir qui devient un couvent de Dominicaines. Ainsi les recluses de Katzental se transfèrent à Ammerschwihr, puis à Colmar, où elles forment le couvent de Dominicaines de Ste Catherine. Et il y a une évolution analogue à Obernai.
De nombreux exemples montrent que des femmes que l’on désigne comme recluses pouvaient vivre en petite communauté puis s’établir en communauté religieuse « régulière » et c’est vraisemblablement ce qui s’est passé à Suntheim.
Thiébaut Walter signalait déjà qu’un béguinage s’était installé vers 1280 à Suntheim. En 1287 ce béguinage aurait adopté la règle de l’ordre des Augustins. Ces religieuses auraient quitté Rouffach en 1290, après s’être rattachées à l’ordre des prêcheurs, « Prediger », c’est-à-dire les dominicains et fondé à Guebwiller le couvent « zur Engelpforte ».
La Chronique de dominicains de Colmar, signale effectivement le 25 novembre 1289 que les recluses de Suntheim ont acheté, pour la somme de cent marcs d‘argent, une terre à Guebwiller :
… die Klauserinnen von Sundheim kauften für hundert Mark ein Grundstück zu Gebweiler…
Et la chronique précise que, quelque temps après, le 29 octobre 1290, ces mêmes recluses quittent Rouffach pour Guebwiller dans le couvent qu’elles y avaient fait construire pour elles :
… 29. oktober (1290) übersiedelten die Klauserinnen von Sundheim nach Gebweiler in das Kloster, das sie daselbst für sich erbaut hatten…
La chronique des dominicains de Guebwiller raconte également l’événement, qu’elle date de 1298 :
„ … Es seind etliche Claussnerin, zu Suntheimb ohnweit Ruffach mit einander einig worden oder überein khummen, und haben ein Hoffstatt genant Sancti Michaelis Insel, zu Gebweiler erkhaufft umb 100 Marckh Silber, worauff sie ein Klösterlein erbawen, der Ehren sancti Michaelis, aller heiligen Engeln undt des heiligen Jacobi Majoris Apostoli, zu welchem neüwen Gotteshaus undterschidliche Edelleith im Landt, wie auch andere guete fromme Christen beygesteüwret und ihre Jahrzeiten da gestüfftet haben…“
Quelques recluses de Suntheim, non loin de Rouffach, ont convenu d’acheter une propriété appelée l‘île Saint Michel à Guebwiller pour la somme de 100 marcs d’argent, sur laquelle elles construisirent un petit couvent en l’honneur de saint Michel, de tous les saints anges et de saint Jacques le Majeur, apôtre. De nombreuses personnes de la noblesse du pays, ainsi que de fervents chrétiens ont versé des dons en faveur de ce nouveau couvent et y ont fondé des messes anniversaires…
Apparemment, elles avaient gardé leur propriété à Suntheim, puisque le 11 août 1291, la prieure GERTRUD et le couvent Engelpforte de Guebwiller vend maison, ferme et terres qu’elle possède à Suntheim à l’abbaye de Lucelle.[11]
En 1337, le 31 mars, des biens leur appartenant sont encore mentionnés dans une charte : un chevalier de Guebwiller, Peter von Epfiche, vend à Gertrud RAPPin de Rouffach, un bien à Suntheim, dans le village, attenant à l’église, entre la propriété des sœurs d’Engelporten et celle de Ruelin HERINGE.[12]
Mais ce qui est troublant, c’est qu’en 1289, avant qu’elle aient acquis à Guebwiller la propriété sur laquelle elles construiront le couvent Saint Michel, dit de la Porte de l’Ange, ces « recluses » sont déjà appelées « Prediger Schwestern », c’est-à-dire dominicaines.[13] Mais rien dans les documents conservés n’atteste l’existence d’un « couvent » de dominicaines, dans le sens où on l’entend généralement, c’est-à-dire avec un lieu d’hébergement et un lieu de prière, chapelle ou église.
L’énigme des sœurs de Suntheim
Un autre document troublant date de 1288 : [14] Johanne SORGE de Suntheim vend aux sœurs HEILIN et BERTHA de Suntheim, les intérêts sur des biens qu’il possédait dans le ban de Suntheim, pour couvrir les dettes qu’il avait contractées auprès de juifs. Ces intérêts devaient échoir à la Prediger Herberge de Rouffach (die an die Prediger Herberge in Ruffach fallen sollen).
Qui sont ces sœurs ?
Sont-elles les „recluses“ dont il avait été question plus haut? Elles ne seraient dans ce cas que deux… Comment auraient-elles pu, alors, posséder l’année suivante, en 1289, la somme de 100 marks pour acheter une terre à Guebwiller ? Il n’est pas dans la vocation des recluses d’amasser de l’argent, surtout des sommes aussi considérables…
Prediger Herberge à Rouffach…
Par ailleurs, l’évocation de la « Prediger Herberge » à propos des sœurs de Suntheim n’est peut-être pas fortuite.
Une telle maison existait donc à Rouffach en 1288. Un autre document, de décembre 1300, la situe dans la « Salzgasse », la rue du Sel, l’actuelle rue de la Demi-Lune, face à la Cour de Clingental.
Une « Prediger Herberge », ce qu'on appelle en latin hospicium, en all. médiéval Herberge et en all. d'historien Terminierhaus, est un relais de prédication et de quête (terminieren = quêter) d'un ordre mendiant dans une ville ou un village où il n'a pas de couvent. Il s'agit d'une maison, souvent tenue par une béguine ou un couple de tertiaires, où les religieux d'un ordre précis peuvent manger et dormir quand ils viennent prêcher et quêter dans la localité où se trouve cette maison ou dans ses environs.
Cette maison est destinée à accueillir les frères qui souhaitent y faire étape au cours de leur pérégrination de prédication et de quête. L’entretien de la maison est souvent assuré par quelques femmes, la plus part du temps des béguines, engagées par les moines. Ces « herbergen » peuvent être fondées par tous les ordres, prêcheurs ou mendiants : pour ce qui est de la maison de Rouffach, il n’y a pas de raison qu’elle appartienne aux franciscains qui sont établis à Rouffach, ni aux bénédictins qui ont également une maison à Rouffach, le prieuré Saint Valentin.
Par contre, il n’y a pas de dominicains à Rouffach. La présence des Dominicains est signalée à Guebwiller dès 1285, mais ce n’est qu’en 1294 que le couvent est fondé. L’église est édifiée entre 1312 et 1339.
A Colmar, l’église des dominicains a été bâtie en 1289 et celle des dominicaines d’Unterlinden à partir de 1269.
La première attestation de cette maison à Rouffach datant de 1288, elle daterait donc des premières années de l’installation des dominicains à Guebwiller et à Colmar.
Il s’agit donc très vraisemblablement d’une maison destinée à l’accueil des dominicains. Avant celle installée dans les murs de la ville, y en avait-il une autre à Suntheim ? Rien pour l’instant ne permet dans les documents de répondre à cette question. Mais il n’est pas interdit d’imaginer que les « dominicaines » de Suntheim avaient été dans un premier temps des béguines qui tenaient la « Herberge » des dominicains de Guebwiller…
Faut-il suivre les éditeurs des annales et de la chronique des dominicains de Colmar lorsqu’ils écrivent [15]:
Les frères prêcheurs établirent en Allemagne quelques couvents de femmes (mulierum claustra) qui, par la suite, prospérèrent merveilleusement en toutes choses. Voici comment on raconte leur fondation par les pères de cet ordre. Dans les premiers temps que les frères prêcheurs arrivèrent en Allemagne, ils trouvèrent quelques pauvres femmes établies, comme recluses (mulierculas inclusas) près des chapelles qu’ils agrandirent et transformèrent en couvents de femmes (et in mulierum claustra mutaverunt). Quelques fois aussi ils réunissaient de pauvres sœurs (etiam pauperes sorores), c’est-à-dire de pauvres femmes qui portaient un certain vêtement religieux, les établissaient en quelque lieu et les organisaient en congrégation monastique. Ils reçurent aussi des veuves et des filles nobles avec le secours desquelles ils construisirent des couvents renommés…
Des semi-religieuses (Halbschwestern) de l’ordre teutonique ?
Mais ces sœurs pourraient tout aussi bien être d’autres sœurs, faisant partie d’une autre communauté, celle des religieuses de l’ordre teutonique…
Une charte de 1331, recopiée par Walter dans U.und R., et conservée aux archives de Karlsruhe, mentionne le transfert des religieuses de l’ordre teutonique de Suntheim à la commanderie de BEUGGEN [16] , sur le territoire de Rheinfelden, dans l’arrondissement de Lörrach, un transfert autorisé par Wolferat von NELLENBURG, commandant suprême de l’ordre dans l’empire germanique. La commanderie de Suntheim verse la somme considérable de 160 marcs d’argent à la commanderie d’accueil des sœurs de Rouffach.
La règle de l’ordre teutonique mentionne des « Halbschwestern » qui, comme les autres membres de la communauté sont soumises à la chasteté, l’obéissance et la pauvreté, mais qui n’occupent qu’un rang inférieur dans la hiérarchie de l’ordre et restent reléguées aux travaux de ménage et d’entretien.
La commanderie de BEUGGEN était possessionnée dans le Mundat supérieur depuis la première moitié du 13ème siècle, ainsi que le prouvent plusieurs documents également cités par Walter. Ils possédaient notamment des biens immobiliers et des terres à Gueberschwihr et Hattstatt. Un des premiers maîtres de l’hospice de Rouffach, Gottfried de Rubiaco, mentionné à Rouffach en 1234, deviendra quelques années plus tard commandeur (Komtur) à BEUGGEN et « Landkomtur » du baillage Alsace- Bourgogne-Souabe.
Il y avait donc une communauté de religieuses de l’ordre teutonique à Rouffach, en 1331, après le départ des « dominicaines » pour Guebwiller.
Et qui pouvait bien être cette sœur dont l’aventure est relatée dans la Chronique des dominicains de Colmar, en 1279, et qui faillit être brûlée vive par les paysans de Rouffach qui l’accusaient d’avoir baptisé une statuette de cire ? Et qui sont ces « frères », à qui elle devait d’avoir la vie sauve ? Une béguine, sauvée in extremis par l’intervention opportune de frères franciscains ?
„… in Ruffach wurde eine Schwester angeklagt ein Bild von Wachs getauft zu haben. Als sie das verneinte, führten die Bauern sie auf das Feld und würden sie mit Feuer verbrannt haben, wenn die Brüder sie nicht aus ihren Händen befreit hätten… „
Conclusion.
En l’espace deux siècles, les béguines disparaissent partout en Europe, sauf en Flandres où elles avaient renoncé à un certain radicalisme et accepté de se rapprocher de l'Église.
Après 1414, les archives que nous avons consultées restent muettes pour ce qui concerne les béguines et béguinages de Rouffach. Cela signifie-t-il que les petites communautés se sont éteintes, que les « sœurs » sont retournées à la vie civile ou ont rejoint d’autres communautés où elles vivront leur foi à l’abri de la clôture d’un couvent et dans l’observance stricte d’une règle monastique ?
Thiébaut WALTER affirme, mais sans citer ses sources, qu’en 1448 le couvent dit Meigerin Convent était devenu une maison accueillant les miséreux, eine Elenden Herberge et que les béguinages auraient continué à exister jusqu’au 16ème siècle mais que leurs sœurs se seraient consacrées essentiellement au soin des malades mais en n’ayant plus, semble-t-il, de relations avec les franciscains.
Il est probable aussi, au moins pour certaines d’entre elles, qu’elles ont poursuivi une action auprès des déshérités et des malades dans l’une ou l’autre des confréries qui s’étaient créées au Moyen-Âge, en particulier la confrérie dite REIT, Reitbruderschaft, fondée par une charte datée de 1358 [17] et dont il sera encore fait mention en 1625 : … die Bruderschafft der wirdigen Mutter Gottes und Himmels Königin Maria, die REIDT genant, allhie in der Pfarrkirchen gehalten… [18]
Gérard MICHEL janvier 2013
[1] Régine PERNOUD La Vierge et les saints au Moyen-Âge Christian de Bartillat Nouv. éd. (12 septembre 1999)
[2] Clément V : vers 1264 - 1314
[3] cité par Claude Henri ROCQUET Petite vie de RUYSBROECK Paris 2003
[4] Dès le XIe siècle apparaissent dans l’Église des confréries de laïcs qui s’appliquent à mener une vie évangélique tout en restant dans le monde. C’’est à François que revient la fondation du premier Tiers-Ordre proprement dit (1222), destiné à tous ceux qui, tout en restant dans le monde, aspirent à mener une vie parfaite. L’Ordre de la Pénitence, appelé ainsi à ses débuts, comprend des clercs et des laïcs, des hommes et des femmes, des gens mariés et des célibataires, qui vivent dans le monde et conservent leurs biens. Ils doivent éviter tout luxe du vêtement et de la table, toute dépense superflue, tout orgueil de sang ou de situation ; les riches doivent traiter les pauvres comme leurs égaux. Les tertiaires jeûnent deux fois par semaine, doivent réciter les offices, visiter leurs frères malades et assister à leur enterrement, s’engagent à payer la dîme et à ne pas porter d’armes. Le mouvement se répandra rapidement, surtout dans les villes, et exercera bientôt une grande influence, même sur le plan politique et social.
[5] Surgand - Surgant - Surcant – Surigand : La première mention de cette famille originaire du secteur de Gueberschwihr date de 1343. Dès 1346, elle occupe la fonction importante de prévôt du village. Bourcard, puis Clewin (diminutif de Nicolas) et Heinrich se succèdent à cette charge entre 1346 et 1407. En 1397, Claus SURGANT est prévôt de Rouffach.
[6] A.M.R. GG 19
[7] A.M.R. GG 24
[8] Th. WALTER Der alte Adel der Stadt Rufach
[9] A.M.R. FF 30 charte n° 115
[10] cité dans U.und R. St.R. (1380 – 1500), page 205 n° 300 11 avril 1289
[11] cité par Thiébaut WALTER dans U. und R. der Stadt R. (662 – 1350), charte conservée dans B.A. Colmar sous Lützel 139/9
[12] cité par Thiébaut WALTER dans U. und R. der Stadt R. (662 – 1350), charte conservée dans B.A. Colmar sous Unterlinden 11/16
[13] cité par Tiébaut WALTER dans U.und R. der Stadt R. (1380 – 1500), page 205 n° 300
[14] cité par Thiébaut WALTER dans U. und R. der Stadt Ruffach, n° 112 page 53, B.A. Colmar Unterlinden 10/14
[15] Les annales et la chronique des dominicains de Colmar Ch. Gérard et J.Liblin Colmar 1854 dans Appendices I, page 223 et suivantes
[16] Beuggen a pris la succession de la commanderie de Rouffach de la fin du XIIIe siècle au début du XVe siècle pour jouer le rôle principal dans le bailliage de Bourgogne-Alsace-Souabe.
[17] A.M.R. Charte 90 (GG 42) du 25 janvier 1358
[18] A.M.R. GG 42 /4 et suivantes : les comptes de la confrérie dite Reit, à partir de 1436.