Exécuteur des hautes œuvres
Le bourreau est l’exécuteur des hautes œuvres : il est chargé d’exécuter les peines capitales et corporelles ordonnées par la justice criminelle. Cette justice s’appuie sur un code de procédure criminelle Halsgerichts Ordnung, ou Carolina qui fixe de manière très réglementée et codifiée les peines encourues selon la nature du crime : sévices corporels, mise à mort par noyade, bûcher, enfouissement, décapitation, écartèlement, pendaison, etc. Le bourreau pouvait également être amené à mutiler ses victimes, en les marquant au fer rouge ou encore en les amputant d’une partie du corps.
L'image ci-dessus est celle d'un projet pour la fourniture du nouveau gibet de Rouffach, en pierre de taille (A.M.R. BB1 fol.177, 1534)
Outre les exécutions, le bourreau était chargé préalablement de tourmenter, de torturer pour obtenir des aveux. Il est présent dans tous les interrogatoires où il procède à la question, et soumet les accusés à la torture, en suivant rigoureusement les instructions du code de procédure. Il doit être capable de déterminer jusqu’à quel point il peut, au cours d’un interrogatoire, poursuivre son office sans provoquer le décès de l’accusé. Cela suppose qu’il soit expérimenté et habile et qu’il ait de réelles connaissances médicales. Ses connaissances en anatomie font que, bien souvent, il est fait appel à lui plutôt qu’au médecin, pour soigner fractures, luxations, entorses… Il n’est pas rare également, qu’en dépit de l’infamie et la souillure dont sa fonction est entachée, on fasse appel à lui pour soigner d’autres maux.
Exécuteur des basses œuvres
Mais le bourreau est également l’exécuteur des basses œuvres, chargé de l’équarrissage des charognes, curage des fosses et des égouts, etc. C’était même là sa tâche la plus importante, celle de Schinder, Abdecker…
Le document qui suit est le serment que doit prêter le bourreau de la ville de Rouffach au moment de son admission et de sa prise de fonction. Il montre bien les deux aspects de son office, mais laisse également deviner le statut si particulier du bourreau, un paria, haï et redouté de tous, mais que l’on respecte, qu’on appelle toujours Meister, Maître, et qu’on sollicite dans les situations graves…
Le serment du bourreau
traduction de A.M.R. BB 126 1613
Le bourreau prête serment, devant Dieu et tous les saints, au prince et évêque de Strasbourg, à la seigneurie de l’Obermundat et à la ville de Rouffach…
- Il ne doit de compte qu’au prévôt et Magistrat de Rouffach et à aucune autre autorité ou juridiction.
- Il doit exercer fidèlement ses fonctions dans la seigneurie de l’Obermundat, dans les villes, vallées et villages et faire preuve d’obéissance à tous moments, tant dans la ville que hors de la ville.
- Il ne peut exiger d’un bourgeois ou d’un habitant de Rouffach plus de trois schillings Stebler d’une carcasse de bête morte qui lui est amenée, et d’un habitant de la seigneurie en dehors de Rouffach, plus de 20 Rappen. Et pour une demi-bête, qu’il s’agisse de veaux, porcs, moutons ou autre, il ne peut percevoir comme salaire, dans la ville ou hors de la ville, pas plus de deux Rappen et il est tenu de charger, transporter et décharger à ses frais les dites carcasses hors de la ville jusqu’au Schölerasen et ne jamais les laisser la nuit au sol en ville. Les peaux des bêtes enlevées restent la propriété du propriétaire de la bête. Si toutefois un propriétaire renonçait à cette peau et la laissait au Meister, ce dernier lui paye 2 Rappen.
- Il est chargé de nettoyer la place devant l’Eglise Notre Dame et devant l’église des franciscains et leurs cimetières aussi souvent que cela s’avère nécessaire ou qu’il lui en est donné l’ordre sans qu’il puisse exiger un salaire pour ce travail.
- Et s’il se trouve qu’en raison des affaires du seigneur ou de la seigneurie du Mundat il soit appelé à se déplacer hors de la ville, il devra toujours se montrer obéissant et on ne lui paiera que les frais de nourriture.
- S’il lui est donné l’ordre de débarrasser la ville de quoi que ce soit de sale ou de malpropre (Unsaubers) il devra se montrer obéissant et faire ce qu’on lui demande dans tous les cas.
- Il ne doit procéder à aucune exécution hors de la seigneurie de l’Obermundat, sans l’autorisation et la volonté expresses du bailli. Si cela lui est autorisé, il ne devra exiger et percevoir aucun salaire et se contenter de ce qu’on lui offrira librement et ne rien demander d’autre.
- S’il doit se rendre sur les lieux d’un suicide et qu’il lui soit ordonné de transporter la dépouille, il doit le faire avec son cheval et ses outils, sans pouvoir refuser.
- S’il lui est ordonné de débarrasser la ville de quelque chose de sale et de malpropre, il est tenu de le faire sans possibilité de refuser et sans salaire.
- Il doit informer le bailli sans délai, dès son retour, de tout cadeau qu’il pourrait recevoir.
- S’il souhaite entrer dans une auberge pour prendre un repas, il doit s’assoir à une table dans un endroit particulier, y manger et ne pas se mêler aux autres clients de l’auberge.
- De même, au marché, il ne doit pas se tenir parmi les bourgeois et se mêler à eux, mais se placer à un endroit particulier où il n’aura de contact avec personne d’autre.
- Et s’il va au marché pour y acheter de la nourriture ou quoi que ce soit d‘autre, il ne devra en aucun cas prendre cet article dans les mains et le toucher avant de l’avoir acheté.
- Il ne doit pas non plus se tenir sous les portes de la ville en compagnie d’autres bourgeois.
- Il ne devra accepter d’autre fonction ni déménager hors de la ville à moins qu’il n’ait au préalable proposé pour sa succession un autre Maître compétent.
- Il n’aura pas le droit de couper en forêt du bois sur pied ou d’avoir d’autre bois que le bois mort, sous peine d’amende.
- Il fait le serment de s’acquitter fidèlement et consciencieusement de sa tâche d’exécuteur, le temps que dureront ses fonctions, lorsque cela lui sera demandé par les princes et évêques de Strasbourg et Landgraf d’Alsace et toute autre autorité, que ce soit dans la seigneurie ou hors de la seigneurie, et cela sans rémunération particulière.
- Il ne doit passer la nuit hors de la ville ou du ban de la ville, sans l’autorisation expresse du Statthalter (Schultheiss est raturé).
- Il ne doit procéder à aucune exécution hors de la seigneurie sans autorisation expresse des autorités de la Régence. Mais quand cela lui a été autorisé et qu’il lui est demandé d’exercer ses fonctions « an fremden Orten », il ne devra exiger aucun autre salaire que ce qui lui sera offert librement et sans contrainte. Il sera autorisé à accepter ces cadeaux.
- Lorsqu’il est appelé à exercer que ce soit dans la ville ou dans la seigneurie, il devra veiller à ne pas dépenser plus que ce qui lui sera alloué par les autorités et ne s’adjoindre aucun aide de manière que la dépense ne soit pas trop grande. S’il a besoin d’un aide, il doit en avertir au préalable les autorités de la Régence (die Amtleuth).
- En contrepartie il lui est alloué par le Receveur du baillage un salaire annuel de 12 livres… darzu hat er auch die Waid.
- De même, la ville lui donne chaque année pour transporter et installer les échelles et les roues hors de la ville, sans aide d’aucune autre personne, 3 livres.
A propos de Schindlach
Schind a pour origine le verbe schinden qui signifie peler, ôter la peau, et a donné le substantif der Schinder, l’équarisseur, l’écorcheur
Lache désigne une prairie marécageuse, un marécage insalubre
Schindlache désigne un endroit marécageux, impropre à la culture, où le Schinder dépouille les animaux morts et enterre les viscères…
Keip, que l’on utilise souvent familièrement en alsacien, àrmer Keip, dummer keip ou soï keip, signifie cadavre et on le trouve dans la toponymie Keip Acker, champ des cadavres où il est synonyme de Schindlache
Eines Henckhers und Nachrichters Aÿdt.
texte original, transcription de A.M.R. BB 126 1613
- Er schwört ein Aidt zue Gott und den Heilligen, unsers gnst. Fürsten
und Herren Bischoffs zue Strasburg und der Landschafft der Obern
Mundat, und sonders der Statt Ruffach, Nutz zue fürdern und Schaden
nach seiner (Ver)mögligcheit zu wenden.
- Item, und was sich in der Zeit und dieweil er hier wohnet und in seinem Dienst
ist begibt deshalben und darumb hie zue Ruffach vor Vogt Schultheißen
und Rhat recht zu geben und nehmen und sonst an kheinem an dern
Endt oder Gericht kheins Wegs.
- Er soll das Ambt und Waid in der Herrschafft obern Mundat in Stätten,
Thälern und Dörffern getreülich versehen und sich allenthalben zue
allerzeit in: oder ausserhalb der Statt Ruffach gehorsamblich
beweisen.
- Er soll auch hauslich und häblich zue Ruffach in der Statt sitzen
und wohnen und soll Ime die Statt Behausung geben, die soll er auch
mit allem irem Gebeuw ohne der Statt Costen in Ehren halten.
- Item er soll auch von einem gezognen und getragnen Vieh so einem Burger
oder Inwohner der Statt Ruffach abgehet nit mehr nehmen den
dreÿ Schilling Stebler und von einem uff dem Landt dergleichen
20 Rappen. Und von einem halben Viehe, es seÿ Kälber, Schwein,
Schaff oder anders, so soll er in: oder ausserhalb der Statt zue Lohn
nehmen nit mehr das 2 Rappen und soll der gemelt Meister
einem jedwedern so albereit Vieh abgehet, dasselb Vieh in seinem
Costen hinaus bis uff des Schölwasen antworten und kheins über
Nacht lassen in der Statt liegen so Ime verkündt würdt auch
dasselb auf und abladen und soll die Haut von jedem Vieh
dem so das Vieh abgangen pleiben, ob aber jemandts uff die
Haut des abgangene Vieh verzeihen wolt, der soll dem
Meister davon zuegeben nichts schuldig sein, sonder gibt Ime
der Meister heraus 2 Rappen und soll niemands nichts verloren
lassen werden besonders welchem jetzit von Viehe abgehet
das soll er alwegs diesem Meister solches anzeigen und
verkünden.
- Item den Blatz vor unsern lieben Frawen Münster desgleichen
vor den Parfüessern so weit derselb Kirchoff gehet, soll
er, so offt Noth sein würdt und er dessen von einem Ambtmann
erfordert wirdt seübern und denselben Mist zusammen schlagen
und ist man Ime davon khein Lohn schuldig zugeben und denselben
ohn der Statt Costen.
- Und was sich begibt daß er in unsers gnst. Fürsten und Herren
oder der Herrschafft der Mundat Geschefften halben über Feldt geschickht
wurde da soll er sich alwegen gehorsamblichen erzeigen
darfür ist man Ime nit weiter zuegeben schuldig dann die Zerung
so lang er in denselben Geschefften aus ist.
- Item ob Ime auch befohlen würdt jetzit Unsaubers aus der
Statt zu seübern und dannen zue tragen oder füeren, da soll er
sich alwegen gehorsamblich beweisen und dem nachkhommen
- Er soll auch niemands, üsserhalb der Herrschafft der Mundat
ohne Erlaubnus, Wüssen und Willen eines jeden Oberambtmans in kheinerleÿ Weg nit richten und ob
Ime aber solches durch den Vogt zuegelassen, da soll er kheinen
Lohn davon nehmen noch erfordern, besonder was Ime deshalb
geschenkht wirdt, aus freÿem Willen, daran soll er benüegig
sein und weiter nit begeren.
- So sich auch ein Persohn leiblos machen thete und Ime befohlen wirdt
hinweg zue füeren, das soll er mit seinem Ross und Geschir zu thuen
schuldig sein und sich dessen nit weigern.
- Wo auch Ime befohlen wirdt etwas ungeseübers in der Statt hinweg
zue thuen das soll er ohne einiche Widerredt zu thuen schuldig sein
ohne einiche Belohnung.
- Er soll auch das so Ime geschenckht würdt einem Oberambtman
so bald er heimkhombt anzeigen.
- Item so er in eines Württshaus geet, willens darinnen zu zehren,
soll er an ein sonder Ort eines Tischs sitzen, zeren und sich nit under
andere Gesellschafften vermischen.
- Item er soll uff dem Markht nit under die Burger stehen, noch sich under
sie vermischen : ob er aber darauf stehen wurde, sich an ein sonder Ortt
stelte. Stüende dan jemandt zue Ime, lasst man es geschehen.
- Und so er des Willens uff dem Merckht under die Burger gehet, Cost oder
desgleichen zue khauffen, soll er deren keines in sein Handt nehmen
besonder zu jedem umb den ermelten Articul khauffen will
das ungerüert Weisen und ob Ime gelegen das zu khauffen mag
er soviel Ime gelegen neben sich legen und vor dem Kauff nit anrüeren.
- Er soll auch in der Kirch hinder der Thür, an einem sondern Ort stehen
und sich nit hinfüro in die Mänge des Volkhs stellen.
- So soll er auch unter den Thoren zue andern Burgern stehen und under
sie stellen.
- Er soll auch hinfüro kheinen andern Dienst an sich nehmen, noch alhie abziehen,
er habe den einen andern taugenlichen Meister an sein Statt
gestellt und praesentiert.
- Item im nidern Holtz soll er khein ander noch grüen Holtz zue nehmen Macht
haben, dan allein uff erschläg Dürrholtz, die soll er nehmen und sich darmit
beholzen und gar kheins abhauwen, beÿ der Straff (.) Ime ein (.) :
That ufzulegen hat.
- Der Nachrichter schwört ein Aidt was in der Herrschafft obern Mundat
oder anderstwo, in des hochwürdigsten, durchleüchtigsten Fürsten
und Herren Bischoven zue Strasburg und Landgrafen zu Elsass
Herligkheiten und Obrigkheiten dieweil er am Ambt ist, nach zue:
richten khombt, daß er dassselbig uff der Ambtleüth Erfordern
und Geheiss ohne sondere Belohnung fleissig richten wölle und sich auch
über Nacht nit ausser der Statt oder Pann Ruffach thuen ohne erlaubt
Schultheiss Stathalter(s)
- Er soll auch auswendig der Herrschafft nit richten ohne
sonder Erlaubung der Ambtleüth ; wan er aber Erlaubnus
hat und verschickht wirdt an fremden Orten zue richten,
soll er an demselben Orth khein Belohnung fordern, anders dan
was Ime freÿ geschenckht wirdt. Das soll er Macht haben
zue nehmen und sich derselben schenckhen lassen vernüegen.
- Er soll auch wan er zu richten erfordert oder geschickht wirdt
es seÿ in: oder ausserhalb der Statt oder Herrschafft obern
Mundat, sich mit den Uncosten geschickhlich halten und niemanden
anders : dan wer Ime von der Obrigkheit derselbern Endes zuegeben
würdt zu Ime zu ziehen, damit der Uncosten nit zu gross
werde; wan er aber richten soll und Hilff bedarff, mage er die
vorhin bestellen, doch alwegen dasselbig den Ambtleüthen zuvor
anzeigen. Dergegen Ime frg.dlg Schaffner 12 Pfundt
ein Jahr gibt darzue hat er auch die Waid.
- Item gibt Ime die Statt alle Jahr für das er selbst
die Leitern und Räder wan er richten solle ausfüehren
und aufrichten muess, ohne Zuethuen oder Hilff anderer
Leüthen...3 Pfundt.