Traduction:
Parce que des humains, hommes comme femmes, ont péché par l’adultère et le blasphème, la colère de Dieu s’est abattue sur eux en les accablant de toutes sortes de maux, la sécheresse, la vérole (la syphilis), les maux de tête, les fièvres froides, les maladies de peau et autres maladies et punitions, il est nécessaire d’éradiquer totalement les plaies que sont l’adultère et le blasphème …
C’est pourquoi Ludwig de Reinach, chevalier, grand bailli de l’Obermundat, ainsi que le Schultheiss et le magistrat de Rouffach ont rédigé ce règlement et punitions pour empêcher et supprimer ces péchés.
En premier lieu, celui qui proférera à l’avenir le nom de Dieu üppiglich (inutilement) et l’utilisera en jurant par le nom de Dieu, par sa morve ! (Rotz), son cadavre, sa puissance, ses viscères, ses intestins, ses poumons, son foie, sa chair, son sang, sa passion, sa mort, ou par le ciel, les 5 plaies ou les 5 éléments, ou tout autre…
ou, celui qui, à l’avenir appellera sur l’autre au nom de dieu, qu’il soit homme ou femme, riche ou pauvre, la syphilis, la peste pestilentz, le mal de saint Antoine, le mal de saint Valentin, le mal de saint Hubert, le mal de saint Quirin, ou tout autre mal,
celui-ci devra, le dimanche ou lors de toute autre grande fête religieuse qui suit sa faute, suivre la procession qui fait le tour de l’église, en portant dans ses mains un cierge allumé d’un poids d’une livre de cire…
Si c’est une femme qui profère un de ces blasphèmes, elle sera condamnée à porter autour du cou la pierre d’infamie suspendue sur la façade de l’église et à faire ainsi publiquement le tour de l’église.
Personne ne doit être dispensé de ces châtiments, qu’il soit homme, femme, riche ou pauvre.
Le bourgeois condamné […] sera exclus du ban de la ville de Rouffach et il lui sera interdit d’y revenir avant huit jours…
[…]
La suite du texte rappelle que celui qui entend quelqu’un, homme ou femme, proférer de tels blasphèmes ou jurons, est tenu par son serment de le dénoncer au prévôt. Quant à celui qui entendrait quelqu’un proférer de tels blasphèmes, jurons ou autres mauvaises actions et ne le dénoncerait pas, il encourra les mêmes sanctions que l’auteur des méfaits.
Si les blasphèmes et jurons sont particulièrement graves, celui qui les profère pourra être puni dans son corps et sa vie, an sinem lib und leben.
La fin du document est consacrée aux jeux et à la danse et aux interdictions qui les touchent. Ce sujet sera traité dans un autre article.
Note : l’usage de tels jurons ou jurements utilisant le nom de Dieu peut nous paraître surprenant aujourd’hui. A la même époque et même bien plus tôt, le français n’était pas en reste et on y trouvait, à quelques nuances près, les mêmes pratiques, si l’on en croit les auteurs du Nouveau dictionnaire des origines, inventions et découvertes dans les Arts, les Sciences, la Géographie, le Commerce, l’agriculture, etc., M.Fr. NOEL et M. CARPENTIER (Bruxelles 1828 ) :
« On jurait dans ce bon vieux temps (le treizième siècle) par Dieu, par la mort Dieu, par le corps Dieu, par la tête Dieu, par le sang Dieu, par le ventre Dieu.
Du Cange (Charles du Fresne, sieur du Cange (1610-1688)) nous apprend […] que l’on jurait aussi par la gorge de Dieu, par sa langue, par sa dent, par sa chair, par sa figure, par le poitron de Dieu sanglant (sa poitrine), par la forcelle Dieu (creux de l'estomac, région du diaphragme, poitrine), par le faire Dieu, etc. Tous ces jurons, et ceux dont le pape Innocent III fait mention, qualifiés au treizième siècle de vilains serments, furent sévèrement prohibés par saint Louis, et tombèrent en désuétude, soit par l’effet des châtiments rigoureux que ce saint roi infligeait à ceux qui les proféraient, soit plutôt par les progrès de la civilisation : ce changement se fit avec lenteur, et n’est pas aujourd’hui complètement opéré.[…]
On substitue au mot Dieu les syllabes di, dié, dienne, bleu, guieux, etc. au lieu de par Dieu, mort Dieu, tête Dieu, ventre Dieu, sang Dieu, etc. on dit pardié, pardi, pardienne, mort bleu, mordienne, tête bleu ; cap de dis, ventre bleu, sang bleu…. »
Texte original:
Wie die Gotteslästerung und das Fluchen öffentlich in der Pfarrkirche bestraft werden soll…
Zu wissen und kunt sige aller menglichen, also bissher gross verachtung (durch unlüterkeit
dess eebruchs und gotzlesterung, gottes dess almechtigen so sich
dann ÿetz gantz gemeinlich durch übung aller menglich beider
wib und mans geschlecht erhaben do durch vilicht gott der
allmechtigen über unns erzurnt und unns aller hant straffen züsend
ist, nemlich mit turung, blottern, houptwe, pestilentzen, kaltwe,
crutzen und andere kranckheiten und stroffen, hierumb semlich übel
dess eebruchs, böser götzlesterung und ander bossheitten so sich ÿetz in übung der welt erhaben
fürder zü vermiden und abzestellen.
So ist durch den edlen, strengen, Herrn LUDWIGen
von RINACH, ritter, vogt und ober amptmann der herschafft dieser ober
Montat, auch schultheiss und radt der statt ruffach, diss nachvolgent
ordnung und stroff semlich übel furter zu vermiden angesetzt und
erkent vestiglich zuhalten von aller menglich zu halten es sÿ edel oder unedel, priester oder leÿen ze halten.
Des ersten, wer furohin me den namen gottes uppiglich in sin mund
nehmen ist und gott den almechtigen mit bösen swüren lesternt ist
nemlich also oder der glich swerende Rotz, lichnam, gotz crafft,
omacht, kröss, darm, lungen, leber, miltz, hertz, fleisch, blüt, hirn,
crutz, marter, liden, sterben, hÿmel, erterrich und V wunden und V elementen
oder der glichenn swüren
Oder wer furohin dem anderen fluchet, es sÿ wÿb oder mannes geschlecht, rich oder arm, die bulren, die blatern, pestilentz, sant Anthonien ,sant Veltins, sant Huprecht, sant Kurin oder ander derglichen blogen
der soll uff den nehsten sontag oder sust houchzitlichen tag nach volbringung sollicher tat der swür in der process dess umbgangs der
pfarkilchen vor dem Crutz offelich umb gon, und ein burnende kerzen
so ein lib. wachs an ir haben ist in der hant tragen. Desglichen
soll ein frowen billd so sollicher geswerde einen volbringen ist,
den lasterstein so vor der kilchen hangen ist, damit zuring umb die
kilchen tragen und soll auch das niemands, es sÿ frou oder mann,
rÿch oder arm, erlassen werden. Harnach hab sich ÿeder[man] zerichten
solichs furter zevermiden.
Es soll auch ein ÿeder burger
der besserung dess lib. wachs obgemelt besserung (der kerzen), acht tag usser dem bann der statt Rufach sin und vor den acht tagen nit darin komen wider harin kommen.
verso
oder inwoner so unser gnedigen herrn gesworen hatt by sinem eid sollich swure
und gotzlesterung wan er di von einem andern hört einem
amptmann anbringen und rügen, es sy von wib oder mans geschlecht.
Wer aber sollich gotzlesterung, swüre oder ander übeltat von dem
andern horte und nit anbrecht und das uff in erfunden, der soll
zu glicher wÿs und straff als der recht thätter mit der selben
straff gestrafft und gebessert werden. Die swür möchtent auch
also gross sin man wurde den menschen der sollich swür volbrecht
an sinem lib und leben stroffen.
A.M.R. AA 3 folio 67: