Première page du registre des délibérations du Magistrat année 1613
Dans l’administration de la ville de Rouffach les jours séparant Noël de l'Epiphanie sont un temps particulièrement important : au cours de ces douze jours, une partie des élus du Magistrat démissionne chaque année de leur fonction de conseiller et de juré ainsi que des offices qu’ils exerçaient. Sur les quinze membres élus du Conseil, seuls cinq d’entre eux sont maintenus dans leur poste, ceux qui exercent les charges les plus importantes, celles touchant aux finances de la Ville, dans lesquelles il importe d’assurer la continuité : économe de l’hôpital, de la léproserie, de l’église, receveur de la taille et receveur de l’Umgelt, la taxe sur le vin.
Une fois les nouveaux conseillers réélus et les charges redistribuées, le conseil au grand complet prête serment au cours d’une cérémonie importante, celle du jour du serment, le Schwörtag. Habituellement seuls deux, rarement trois, ne sont pas renommés, remplacés par un membre proche de la famille qui leur cédera son poste dès l’année suivante…
Cette année-là à Rouffach, en 1612, ces festivités sont honorées par la présence du seigneur de l’Obermundat, Léopold, évêque de Strasbourg accompagné d’une partie de sa cour et d’Herman Adolphe, comte de Salm, grand bailli, qui sont arrivés à Rouffach la veille de Noël (am heiligen Weÿnach Aubend). Le douzième jour (am Obent des XII.ten Tags), veille des trois Rois, ils présideront à l’hôtel de ville les cérémonies de la résignation et de l’investiture des nouveaux conseillers du Magistrat et à la prestation des serments. (voir la page Obermundat )
Dans son compte rendu consigné dans le registre des délibérations du Magistrat, le greffier de la ville souhaite que pour la nouvelle année 1613 Dieu tout puissant accorde à tous et à chacun en particulier une bonne santé et un gouvernement qui leur garantisse la paix (?).
Il termine, en souhaitant que la toute-puissance divine confère au prince évêque et au grand bailli une santé durable ainsi que la paix et la sagesse dans son gouvernement, et à nous tous, et à chacun d’entre nous en particulier, la vie éternelle après notre bref passage sur terre.
Qu’il en soit ainsi Amen.
Des hôtes encombrants...
On n’apprendra rien de plus sur ce séjour du prince-évêque dans notre ville. Habituellement il se déplace à chaque visite avec sa cour, souvent 150 personnes et 130 chevaux, sa garde personnelle et sa domesticité : tout ce monde loge en partie au château mais la plupart sont logés en ville, le plus souvent chez les bourgeois de la ville. Ce qui ne manque pas de provoquer des incidents, des rixes, des bagarres entre fils de bourgeois et gens du seigneur !
On remarque également, curieusement, qu’après des séjours prolongés du seigneur à Rouffach, il arrive que le Magistrat soit contraint de prendre des mesures pour exclure les prostituées et éradiquer la prostitution dans la ville…à la suite de bagarres dans lesquelles étaient impliqués des gens de la cour épiscopale ! De là à croire que les prostituées étaient du convoi ou suivaient de peu le convoi dans ses déplacements ...
Rappelons que les évêques de Strasbourg sont alors administrateurs laïcs et perçoivent les bénéfices de leur(s) diocèse, la charge du diocèse étant portée, en réalité, par le doyen du Grand-Chapitre. Rouffach, et l’Obermundat est une seigneurie appartenant à l’évêque de Strasbourg mais dépendant du diocèse de Bâle au plan spirituel.
Ce Léopold, archiduc d’Autriche de 1607 à 1625, résignera ses évêchés en 1626 et épousera Claude de Médicis dont il aura cinq enfants en 6 ans de vie conjugale. De ces cinq enfants, l'aînée est morte à l'âge de deux ans, les autres, deux garçons et deux filles, connaîtront tous des destinées intéressantes. Il avait été nommé coadjuteur de l'évêque de Passau en Allemagne à l’âge de 11 ans, coadjuteur de l'évêque de Strasbourg en Alsace à 12 ans, évêque de Passau à 19 ans et évêque de Strasbourg à 21 ans, le 24 novembre 1607.
L'archiduc Léopold et son épouse Claudia de Médicis
Transcription de la première page du registre des protocoles du Magistrat 1613:
Nach verflossenem 1612 Jahr, ist in disem new angangenem 1613 (welches uns sambt und sonders der Allmechtig Gott mit Gesundtheit und gueter Regierung auch erleben wölle lassen) da zuvor besonders am heilligen Weÿnacht Aubendt, der hochwürdigst, durchleuchtigst Fürst und Herr, Herr Leopoldus, Erzherzog zu Osterreich, Bischoff zu Straßburg und Passau, Landtgraf in Elsaß, unser gnedigster Herr, mit theilß I. dht. Hoffwesen und mit darselben der hoch erwürdig, hochwolgeborn Herr, Herr Herman Adolph, Grave zu Salm, Statthalter General des Bistumbs Straßburg, glükhlich ankhomen seindt, am heilligen dreÿ König Aubendt den 5. Januarii, an Statt und Innamen Irer frstl. dhlt. auch dero Hern General Stathalters oblaut, uffm Rhathaus daselbsten, nach uraltem Herkommen, einem erb(samen) Rhat gn(ädiglich) abzudanckhen und andere Notwendigkeit zuverrichten, erschienen und furkhommen / der Edell Vest Junkher Geörg Diterich von Wangen, höchstermelter frstl. dht. Rhat, als nun Aubendts dies Geschefft verricht, und den folgenden Tag der Schwertag angesehen und auch gehalten worden, ist beÿ diesem Actu in selbster Gegenwart gn. erschienen hochwolmelter Herr Stathalter General und von Mir, Stattschreiber der Burgerschafft, die Ursach abermahliger Zusamenkunfft vorderist mundtlich fürgehalten / und darauf die beschriebene burgerliche Ordnung, sambt dem Aidt schrifftlich ab- und vorgelesen worden.
Sein gottliche Allmacht verleÿhe höchsternanter frst. dht. und der H. Stathalter langwierige Gesundtheit, friedtliche Regierungen, und uns allen, sambt und sonders, nach diesem zergengliche, das ewige Leben
Amen 1613