Comment convient-il de danser, dans un lieu public, sur la Tanzmatte ou dans le Tanzhaus, en 1581 à Rouffach?
Nous avons déjà évoqué dans ces pages les nombreuses journées chômées auxquelles étaient contraints les hommes et femmes du Moyen-Âge et du début des temps modernes: avec les dimanches et fêtes religieuses, près d'une journée sur trois est chômée. Boutiques, échoppes et ateliers sont fermés, et toute activité est suspendue, dans tous les registres des métiers et les contrevenants sont sévèrement punis...
Si les journées de travail sont longues et le loisir quotidien rare, les occasions de festoyer sont donc nombreuses: dimanches et jours de fêtes religieuses permettent au peuple de se livrer à d'autres occupations, à condition d'avoir au préalable assisté et participé aux célébrations religieuses du jour! La première de ces occupations est bien évidemment la fréquentation des cabarets et autres tripots, elle aussi sévèrement contrôlée et interdite, en particulier, pendant les offices religieux! D'autres activités, plus sportives, des jeux de force comme des lancers de poids et le tir, opposent les hommes dans des concours, pendant que d'autres s'adonnent au plaisir de la danse tanzen und springen sur les prairies hors les murs, les Tanzmatten ou dans la Tanz Haus, une maison située sur la place devant la façade ouest de l'église, spécialement dédiée à cette activité.
Mais toutes ces manifestations sont contrôlées par le Magistrat qui tente d'en limiter les excès et surtout par l'autorité religieuse qui les accuse de répandre la luxure et multiplie les interdits!
Voici un extrait d'un règlement de la police de la Ville de 1581, qui réglemente la danse:
Wie man dantzen soll
Welcher oder welche Burger, Buergers Sönne, Handtwerckhs
Gesellen, Frembde oder Heimische, wehr die sein, so hinfüro,
es sey bey Hochzeiten oder sonnst, an Sontagen oder
Feüertagen, dannzen wellen oder wurden, die sollen
alle sampt ire Degen oder Gewehr so offt und dickh
sie im Dannzen sein abthun und keiner anzuetragen
gelassen werden, bey der Straffe fünf Schilling
unabsesslichen ab zu nemmen. Darneben auch solle ein
jeglicher mit Frawen oder Junggfrawen züchtlich
und den Zuesehennden ohne Ergerlichen dannzen…
Darzue die Frawen oder Jungfrawen unordentlicher
weise als bissher beschehen, nit umbschwembhen (vraisemblablement umbschwenckhen)
zu dem sie auch als von alter beschehen nach einander
stellen und nit als das unvernünfftig Vÿhe
durch einander laufen alles bej Peen obberirte
Straf darauf den Poten Acht zu haben Bevelch gegeben.
Comment il convient de danser…
Le ou les bourgeois, fils de bourgeois, compagnons de métiers, qu’ils soient de la ville ou d’ailleurs, qui qu’ils soient, qui dansent ou voudraient danser, un jour de fête, un dimanche ou tout autre jour férié, sont tenus de déposer dagues, épées ou toute autre arme et de ne pas en porter sur soi, chaque fois et aussi souvent qu’ils danseront. Les contrevenants seront punis d’une amende de cinq schillings…
De plus, chacun devra se tenir de manière courtoise avec les femmes et les jeunes filles et ne pas se comporter de façon scandaleuse…
Par ailleurs, ils ne doivent plus, comme cela se faisait jusqu’alors, faire virevolter les femmes mais se placer (en rangs ?) les uns derrière les autres et ne pas courir dans tous les sens comme un troupeau de bétail privé de raison, sous peine de l’amende susdite. Les sergents de la ville ont reçu ordre de veiller au respect de ces règles.
Transcription et traduction Gérard MICHEL Août 2018
Danse paysanne Pieter Bruegel l'Ancien