Les archives municipales de Rouffach conservent dans leur fonds ancien un document vieux de 240 ans qui ne manque pas de saveur et nous invite à la réflexion, nous qui nous plaignons sans cesse de la jeunesse actuelle !
Nous, les Bailli et Magistrat assemblées sur l’hôtel de ville, nous ayant été faits différents rapports des excès et voies de faits multipliés qui se commettent journellement en cette ville et ban, soit par la jeunesse effrénée soit par d’autres méchants garnements, au point que non contents de casser et briser nuitamment les fenêtres à différents particuliers, de forcer les serrures, de casser et ouvrir les portes des maisons, d’y briser les meubles, d’y maltraiter les personnes qui se trouvent dans le repos, de roder pendant toute la nuit par les rues, d’y attaquer et maltraiter à coups de pierres, de tricots et même d’instruments tranchants indifféremment les particuliers qui se trouvent obligés de sortir de chez eux pour se transporter où leurs affaires ou leur ministère les appellent jusqu’à là que n’y médecin , chirurgien, sage-femme et même le curé n’osent sortir sans se faire escorter par la garde ou par d’autres particuliers, mais que ces turbulents poussent leur […] méchanceté au point de forcer les écuries, d’y mutiler les chevaux en leur coupant les oreilles et les queues, d’estropier les bêtes à cornes avec des instruments tranchants, de couper la tête aux brebis, de gâter et ravager les jardins au point d’y couper et déraciner les arbres fruitiers en nombre et même d’y brûler les maisonnettes des jardins en dehors de la ville, et que quoique l’on n’aie pu jusqu’à présent avoir des preuves assez constatées contre les auteurs de ces excès pour les faire punir en justice ordinaire que cependant tous ces désordres multipliés coup sur coup devenaient intolérables ; étant d’ailleurs que trop instruits de tous ces faits et considérant que notre devoir exige que nous portions toute notre attention à y pourvoir,
Nous, les dits Bailli et Magistrat avons sous le bon plaisir de Monseigneur le Maréchal de Contades, commandant en chef de la Province, ordonné qu’en exécution de l’ordonnance de notre Seigneur du 4 novembre 1762 et de celle de Feu M. de Saint André du 10 décembre 1751
Sçavoir :
- que l’officier qui tiendra la police veillera le plus scrupuleusement à ce que les bourgeois et habitants fassent exactement la garde en personne sans souffrir qu’il s substituent d’autres en leur place à moins d’empêchement légitime et bien vérifié
- que celui des bourgeois et habitants qui ne pourra faire sa garde à son tour par empêchement légitime ne pourra substituer d’autre en sa place qu’un particulier jugé convenable par l’officier de police si mieux il n’aime qu’il lui soit substitué l’un des invalides, soldats réformés ou autres par nous arrêtés pour faire la garde par substitution, comme gens assurés et capables à raison de 12 sols par vingt quatre heures. De quoi il sera fait rapport par le sergent de garde, lequel remettra à chaque changement de garde un état à l’officier qui tient la police contenant les noms de ceux qui y sont commandés, pour par lui être pourvu en cas de défaillance de l’un ou de l’autre, ou autre inconvénient.
- ne pourront ces particuliers qui font la garde s’en absenter sous prétexte d’aller prendre la nourriture chez eux ou pour autre cause que ce puisse être sans être remplacé avant que de quitter.
- en égard au désordre actuel et le nombre de 600 feux passé qui se trouvent en cette ville, avons ordonné que la garde ordinaire sera composée de sept hommes non y compris le sergent de garde établi en titre d’office dont la moitié fera continuellement surtout pendant la nuit la patrouille, en se relevant et se distribuant dans les différents quartiers de la ville.
- que la dite garde sera doublée toutes les nuits des veilles de fêtes et dimanches ainsi que pour les nuits des dits jours.
- […] immédiatement après la retraite sonnée la patrouille ramassera et arrêtera tous les jeunes gens qu’ils trouveront courir les rues et les mèneront soit au corps de garde ou en prison jusqu’au lendemain ce qui sera pareillement par eux observé contre les particuliers de la ville qui seront trouvés dans les cabarets à des heures indues et même contre les cabaretiers qui s’aviseront de garder chez eux des gens domiciliés après la retraite sonnée […]
- et pour obliger tant le sergent de garde établi en titre que les particuliers qui font la garde d’être exacts et vigilants à faire les patrouilles et d’empêcher tout désordre, seront tous et un chacun d’eux solidairement responsables des dommages et dégâts qui pourront se faire en ville par un défaut de leur vigilance.
- enfin personne ne pourra prétendre l’exemption à faire la garde, que ceux à qui elle se trouve accordée par l’ordonnance de notre Seigneur le Maréchal ou par des ordonnances émanée de lui ou d’autre supérieur majeur.
Fait et arrêté le dix sept juin mil sept cent soixante et dix sept, signé à l’original :
Baur, Kitterle, Bilger, Friess, Spinner et Juncker.