Christkindel et Hans Trapp venant demander si les enfants ont été sages Th. Schuler 1858
En ce mois de décembre, le soleil nous manque, provoquant chez les plus fragiles d’entre nous, une carence en vitamine D que l’on peut pallier fort heureusement chez nos pharmaciens. Nos ancêtres étaient eux aussi sensibles au manque de lumière à l’approche du solstice d’hiver et on ne s’étonnera pas de voir s’accumuler en cette période, des fêtes chrétiennes ou réminiscences de rites païens, appelant le retour de jours plus longs. La célébration le 13 décembre, de la Sainte Lucie de Syracuse, patronne des aveugles, des ophtalmologues et des électriciens, en fait partie. « À la Sainte Luce, nous dit le dicton, le jour croît d’un saut de puce », mais le jour le plus court n’est-il pas le 21, date du solstice ?
Pour bien comprendre ce qui se produit à la Sainte Lucie, il pourra être utile de revenir aux explications de l’équation du temps dans notre article sur la méridienne Adam de Rouffach ou encore de se référer à la réforme du calendrier de 1582 commandée par le pape Grégoire XIII.
L’heure du coucher du Soleil
Voici un extrait des éphémérides pour décembre 2021 et janvier 2022 qui donnent les heures des levers et couchers de Soleil pour Strasbourg :
On observe que le 1er décembre, le Soleil se couche dès 16 h 35, puis encore un peu plus tôt les jours suivants jusqu’aux 13, 14 et 15 décembre. À partir du 16 décembre, le Soleil retarde l’heure de son coucher, si bien qu’à la veille Noël, il ne se couche qu’à 16 h 37. Ainsi la Sainte Lucie est peut-être la date à laquelle le Soleil se couche le plus tôt.
Mais si l’on s’intéresse à la durée du jour, le plus court est bien le 21 décembre, puisqu’après le 13 décembre, le Soleil continue à retarder son lever, et même bien au-delà du solstice, l’heure la plus tardive de son lever se trouvant au passage de la nouvelle année où il se lève à 8 h 21.
Cette différence entre les dates du Soleil le plus paresseux du soir et celui du matin, est due à l’équation du temps, une expression du décalage entre l’heure solaire donnée par la course du Soleil dans le ciel et l’heure moyenne affichée par les horloges de précision. L’heure solaire est en avance d’ ¼ d’heure sur l’heure moyenne en novembre et en retard d’ ¼ d’heure en février. Entre novembre et février, le Soleil retarde de plus en plus son passage au méridien. La différence entre l’heure solaire et l’heure moyenne est matérialisée sur la méridienne Adam de l’église Notre-Dame de Rouffach : en décembre, l’ombre du style à midi parcourt le segment supérieur de la courbe en 8. On pourra relire l’article consacré à cette méridienne pour trouver plus d’explications.
La méridienne Adam, tour sud de N.D. de Rouffach
Le dicton de la Sainte Lucie trouve cependant une explication plus simple et plus plausible que cette subtile distinction entre l’heure solaire et l’heure moyenne : lorsque l’on dit que le jour augmente d’un chouïa, il n’est sans doute pas seulement question de l’heure du coucher de Soleil, mais bien de la durée totale de la journée, du lever du Soleil à son coucher.
La réforme du calendrier de 1582
En instaurant son calendrier julien, Jules César et ses années bissextiles n’y avait pas intégré la durée exacte de l’année tropique (365 jours 5 heures et 48 min) et cette petite erreur de quelques 12 minutes se répétant au fil des années et des siècles s’était traduite par un lent décalage des saisons qui atteignait une bonne dizaine de jours à la fin du XVIe siècle.
Ainsi, de façon imperceptible, du fait de la précession des équinoxes, la succession des saisons avait pris de l’avance tout au long du Moyen Âge et le concile de Trente proposa une réforme du calendrier. Le pape Grégoire XIII suivit cette recommandation et instaura en 1582 le calendrier grégorien en faisant un bond de 10 jours pour réajuster les dates des saisons : le lendemain du jeudi 4 octobre 1582 fut le vendredi 15 octobre. Avant cette réforme, le solstice d’hiver se produisait environ 10 jours trop tôt, soit aux alentours de la Sainte Lucie.
Bon nombre d’historiens [1] pensent que le dicton de la Sainte Lucie date de cette époque, antérieure à la réforme du calendrier, où le 13 décembre correspondait effectivement au solstice d’hiver. Sur Obermundat, on retrouvera un article relatif à la précession des équinoxes étudiée par l’astronome local Remus Quietanus.
Jacques Mertzeisen, décembre 2021.
[1] E. Fichot (1931), Méditations sur la puce d’une Sainte, l’Astronomie, volume 45, pages 523 à 528, online.
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