Le peuple ployant sous la charge des impôts Musée Carnavalet, eau forte colorée 18ème siècle
… adjudication au plus offrant et dernier enchérisseur, des droits et revenus des revenus de la Ville…
Les fermiers dont il sera question dans cet article ne sont pas des agriculteurs ou des éleveurs, mais des collecteurs d’impôts. La perception de l’impôt, taxes, amendes, droits, ... dus par la communauté, est amodiée à un fermier, qui avance, sur ses fonds propres, la somme totale des impôts à recouvrer. Puis, ce fermier collecte lui-même, avec l’aide de commis, les impôts affermés, pour récupérer son avance : ce système procure à la ville des liquidités immédiates et permet, on s’en doute, des bénéfices substantiels pour le fermier, qui ne se prive pas de surtaxer les contribuables.
La maison de Melchior Ginter, bourreau de Rouffach
Bien qu’il jouisse de certains privilèges et bénéficie de conditions matérielles meilleures que celle des basses classes, l’ostracisme vécu au quotidien par l’exécuteur des hautes et des basses œuvres et sa famille était puissant. Le bourreau était logé en marge de la ville, à l’écart de la société et exclu de la vie sociale et bourgeoise. Haï et redouté de tous, sa fonction en a fait un intouchable craint par la société.
Cet isolement du bourreau et de sa famille a conduit progressivement à des alliances entre familles de bourreaux, donnant naissance à de véritables dynasties et la charge est devenue héréditaire.
A Rouffach s’est formée une telle dynastie qui remonte à la fin du 16ème siècle, celle des Ginter ou Günter (souvent également orthograhié Ginther ou Günther) qui s’éteindra peu après la Révolution avec le dernier bourreau de la ville, Gervais Seitler.
Le serment du bourreau (AMR BB 126 1613)
Sous l'ancien régime, le statut de bourreau est infamant, lui et sa famille sont de mauvaises fréquentations: la charge d'infâmie qui pèse sur le père se transmet à son épouse et ses enfants. Le document qui suit, extrait du compte-rendu d'un Conseil hebdomadaire du Magistrat illustre l'opprobre qui enferme ces familles et les condamne ces à vivre en marge de la société.
Ainsi, il est interdit à l’épouse du bourreau de la Ville d'être marraine de l'enfant d'une famille "honorable" et celui qui lui en fait la demande est puni par la loi ! Jacques Bentelin, le tisserand, est condamné à une amende par le Conseil de la ville, parce qu'il avait demandé à la femme du bourreau d'être la marraine de son enfant!
Couverture du ZINSBUCH des Spittals Sant Jacob 1492
Depuis quelques années , je suis à la recherche d’indices qui attesteraient le passage de pèlerins qui auraient fait étape à Rouffach sur leur route vers Saint Jacques de Compostelle. Dans les cahiers de comptes des Burgermeister successifs, comptables de la Ville, sont notées scrupuleusement toutes les recettes et surtout les dépenses, même les plus modestes. Y figurent notamment les aumônes données, umb Gottes Willen, pour l’amour de Dieu, à une multitude de gens de passage, nécessiteux de toutes sortes, indigents, malades, infirmes, estropiés, jetés sur les routes, en quête d’un asile et de quelque nourriture.
Parmi eux, des pèlerins qui, dans cette foule, se distinguent des vagabonds : le pèlerin accomplit « un voyage de plus ou moins longue durée, effectué pour faire une visite à quelque lieu sacré en esprit de pénitence, de piété ou d’action de grâce » [2]
Récolte de pommes de terre, huile sur toile, Jules Bastien LEPAGE 1879,
National Gallery of Victoria Melbourne. (image Wikipedia)
Si la pomme d’Or fut dans l’Antiquité une source de discorde qui conduisit à la guerre de Troie, les pommes de Rouffach, qui n’étaient pas d’Or mais de simples pommes de terre, n’en causèrent pas moins un sacré remue-ménage dans la cité !
De quoi s’agit-il ?
Gérard MICHEL
Ancien professeur de Lettres et passionné de paléographie, je partage sur ce blog le fruit de plus de 20 ans de travail autour de documents d'archives.
Cette page contient des liens vers des outils et sites partenaires autour de la paléographie, l'histoire et l'Alsace.
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